S’il n’a pas confirmé la qualification gouvernementale des événements tragiques qui endeuillent les provinces kasaïennes depuis août-septembre 2016, qui les considère comme du terrorisme, Adama Dieng n’en était pas loin. Le conseiller spécial du secrétaire général des Nations-Unies, dépêché en RD Congo pour étudier la situation sécuritaire dans les Kasai et en faire rapport à sa hiérarchie a néanmoins tranché net : « La situation du Kasai bien que grave ne constitue pas un cas de génocide ». Point barre. Le conflit kasaïen ne réunit pas les éléments constitutifs du crime de génocide, parce que l’intention de s’en prendre à un groupe particulier de la population, et la définition de ce groupe particulier visé font défaut, a expliqué à la presse le diplomate onusien qui bouclait sa mission après un séjour à Kananga (Kasai Central) et à Tshikapa (Kasai). Adama Dieng a, contrairement aux évêques de l’église catholique qui avait publié des statistiques impressionnantes sur le même conflit quelques heures plus tôt et aux radicaux du Rassop, dénoncé la responsabilité des miliciens Kamwina Nsapu, des forces de l’ordre et de sécurité ainsi que des forces d’auto-défense locales dans l’escalade des violences enregistrées et la crise humanitaire qui en découle.
Le conseiller spécial d’Antonio Guterres estime que le rétablissement de la paix dans les Kasai reste tributaire du dialogue avec les communautés locales et s’est prononcé pour une forte démilitarisation de la région. De même qu’il en appelle à des poursuites judiciaires à l’encontre d’acteurs et instigateurs des violences kasaïennes. Il faut réduire la présence militaire dans le Kasai, selon le diplomate onusien. Une proposition qui suscite de sérieux doutes même si elle semble faire l’affaire des technostructures onusiennes visiblement désireuses d’accroître à nouveau leur présence et leur rôle sérieusement questionnés lors de la dernière assemblée générale des Nations Unies à New York. Car elle contredit de manière flagrante le principe de la responsabilité première de l’Etat congolais dans la sécurisation de ses populations. On peut en effet s’étonner que la RDC soit la seule responsable de la sécurité sur son territoire mais que des officiels onusiens en mission ponctuelle s’arrogent le droit de prendre des dispositions pratiques quant à ce.
Selon des experts du ministère de l’Intérieur interrogés le week-end par Le Maximum, la solution d’une forte démilitarisation d’une zone engluée dans des conflits sanglants, déjà appliquée au Rwanda au milieu des années ’90, comporte de sérieux risques. « Dans ce pays voisin de la RD Congo, tout le monde avait vu venir le génocide mais personne n’avait pris la bonne décision qui consistait à ne pas faire partir les troupes onusiennes dépêchées sur les lieux », rappellent-ils.
En tout état de cause, pour ramener la paix dans les Kasaï, le gouvernement central ne s’est pas arcbouté sur une option à 100 % militaire. Il a usé de négociations, avec la famille régnante Kamwina Nsapu, dont un successeur a été désigné conformément aux lois nationales et à la coutume locale et occupe le trône laissé vacant. En même temps que des éléments armés et de la police étaient dépêchés dans les zones perturbées de la région pour mettre hors d’état de nuire des terroristes drogués qui décapitaient à tout va et contenir l’expansion du mouvement.
J.N.