L’Abbé Nshole est formel : le lider maximo n’a jamais remis à la Cenco un acte écrit désignant le Premier ministre. Raphaël Katebe Katoto le confirme : au cours de ses nombreux contacts téléphoniques avec lui, le Sphinx de Limete n’a jamais déclaré la formalisation de la désignation. Pourtant, Valentin Mubake et Peter Kazadi – respectivement conseiller politique et conseiller juridique d’Etienne Tshisekedi – persistent et signent : avant de repartir sur Bruxelles le 24 janvier 2017, leur chef se serait acquitté de ce devoir…
En attendant de savoir où se situe la vérité, force est de constater que ce document a tout du fameux monstre de Loch Ness. Tout le monde en parle, personne ne le voit. Aussi étonnant que cela puisse paraître, cet acte n’apparaît ni ne paraît dans les médias, principalement les réseaux sociaux – pendant que des documents de moindre importance, parfois d’origine douteuse – font le buzz sur le Net. Parmi lesquels, on s’en doute, le cursus “professionnel” de Félix-Antoine Tshisekedi ponctué de quelques stages saisonniers en informatique. Serait-ce la raison pour laquelle le lider maximo s’est abstenu de désigner son fils au poste hautement stratégique de Premier ministre, Chef du Gouvernement, dont le critérium exige du prétendant d’être : 1. Diplomate, patriote et crédible, 2. Compétent et d’une forte personnalité, 3. Rassembleur et intègre, de probité morale approuvée, en plus d’avoir, 4. Une connaissance des grandes questions liées aux dossiers importants du pays, et 5. Une expertise de gestion suffisante des affaires publiques ou son équivalence ? Ou simplement le père a-t-il estimé qu’avec toute la lutte commune menée avec ses compagnons des années de braise, il était injuste d’en faire bénéficier les dividendes à sa seule famille biologique…
Pour l’instant, l’opinion avertie est intéressée par le pavé jeté dans la mare par Raphaël Katebe Katoto le vendredi 17 février 2017 sur les antennes de Top Congo Fm. «Quand j’ai parlé avec le président Tshisekedi et je lui ai dit que je voulais aussi me porter candidat pour apporter ma contribution au pays, il m’a dit ceci : ‘c’est une bonne chose. Nous allons récolter les avis des uns, des autres. Et après, nous allons trancher, mais ça m’aide beaucoup que vous vous portiez candidat parce qu’il y a une candidature ici où on me fait pression que je ne suis pas pour’», a-t-il déclaré, sans ambages. Une déclaration qui lui a valu une suspension de la part de l’«AR» (Alternance pour la République), regroupement animé par Delly Sessanga et dont l’objectif ouvertement affiché est de soutenir la candidature de Moïse Katumbi à la présidence de la République, candidature portée déjà par G7). Même si dans l’opinion, on ignorait tout de quelque responsabilité que ce soit de Katebe Katoto dans l’une des plateformes katumbistes les plus insignifiantes qui soient, à en juger par l’envergure populaire de ses animateurs.
La veille de cette interview, Valentin Mubake s’était rappelé au bon souvenir des siens et l’opinion en déclarant qu’«Il n’y a pas de candidat premier ministre, il y a le Premier ministre, car M. Tshisekedi en sa qualité de président du conseil des sages du Rassop avait remis à la Cenco le nom de celui qui doit occuper ce poste pour le compte de ce regroupement ». Et qu’il appartenait « …à la Cenco d’acheminer ce dossier de candidature à qui de droit tel que prévu dans l’accord».
Il y a cependant une nuance importante dans cet article intitulé «Valentin Mubake : ‘Monsieur Tshisekedi avait remis le nom du premier ministre entre les mains des évêques’», publié par un confrère paraissant à Kinshasa. Qui note que : «Sans toutefois affirmer ni infirmer que Félix Tshisekedi est le candidat proposé par l’autorité morale du Rassop, décédé en début du mois de février, Valentin Mubake se réjouit du fait que le dossier se trouve entre les mains de la structure habilitée à gérer ce dossier qui, selon lui, ne concerne pas l’UDPS en tant que tel, mais c’est le président du conseil des sages qui s’est acquitté de son devoir».
Dans son posting du 16 février 2017, le web site www.7SUR7.CD reprend les propos de Christophe Lutundula : «Concernant la question du premier ministre, Christophe Lutundula a rappelé la position du Rassop de présenter un seul candidat tel que convenu dans l’accord du 31 décembre. Ouvrir une brèche aux interprétations multiples fera tomber l’édifice de l’accord, estime ce cadre du G7 et membre du Conseil des sages du Rassop». C’est dans la dépêche intitulée «Christophe Lutundula : ‘Nous avons besoin de 48 h pour décider de la succession de Tshisekedi à la tête du CNSA’».
Se libérer de la pression…
En analysant les propos de Mubake et de Lutundula, on constate facilement qu’autant le premier est affirmatif quant à la remise de l’acte de désignation par Etienne Tshisekedi à la Cenco – ce que dément celle-ci – autant le second est désespérément vague. Les deux ne sont donc pas en mesure de le brandir.
On imagine ce qui se passerait si quelqu’un le sortait, et ce qu’il soulèverait comme curiosité. Il pourrait susciter tellement de doute qu’un examen graphologique serait réclamé. Ce serait terrible qu’on en vienne au constat d’un faux ! C’est toute la documentation Udps portant la signature du défunt qui serait mise en cause.
Mais, ce qui est déjà terrible, c’est le fait que le lider maximo ne se soit pas confié à un seul confident au sujet de l’existence de l’acte de désignation. Ni Mubake, ni Kazadi, ni Katumbi. Bref, personne de l’Udps, du «Rassop» ou de la famille biologique.
Et ce qui l’est davantage, c’est la disqualification de son propre fils pour le poste de Premier ministre. Une attitude pouvant se justifier soit par le doute sur le profil de l’emploi, soit – comme relever dans le chapeau – par la volonté de ne pas faire bénéficier les dividendes de la longue lutte de l’Udps à sa famille biologique.
Dans la première éventualité, tout le monde (avisé) est conscient du fait que Félix Tshisekedi n’a aucune expérience en gouvernance institutionnelle. Aurait-il été député national qu’il aurait tiré de précieux enseignements de cette gouvernance, à l’instar de son cousin Samy Badibanga. Or, cela n’est pas le cas.
Dans le contexte actuel, le pays n’a pas besoin de Premier ministre populiste qui, à chaque manifestation d’incompétence pour le traitement de tel projet ou l’exécution de tel programme se mettrait à crier aux pièges, à envoyer des textos. Le discours du genre «peaux de banane» des années 1990 passera difficilement une trentaine d’années après.
Dans la seconde éventualité, accusé à tort ou à raison d’avoir «lubaniser» le parti, Etienne Tshisekedi a probablement cherché à déjouer le piège dans lequel les ex-Kabilistes du G7 et les autres membres du « Rassemblement » ont tenté de l’enfermer en promouvant la candidature de Félix Tshisekedi. Exemple probant : le 10 janvier 2017, une délégation de la plateforme s’est rendue à la Cenco pour le dépôt de cette candidature. «Nous venons de proposer l’honorable Félix Tshisekedi Tshilombo…La tendance générale et essentielle s’est dégagée autour de lui au sein du Rassemblement», a déclaré Jean-Pierre Lisanga Bonganga.
On sait que le 7 janvier 2017, Pierre Lumbi s’est voulu catégorique : «Nous pensons, nous acceptons même que l’Union pour la Démocratie et le Progrès Social(UDPS) puisse nous proposer un candidat Premier ministre ! (…) Il faut être malhonnête pour ne pas reconnaître que l’UDPS a un poids historique qu’aucun autre parti n’a (…)», a-t-il dit.
C’est de cette pression, évoquée par Katebe Katoto, qu’Etienne Tshisekedi voulait se libérer le lider maximo.
Il n’est pas parvenu à arracher le OK du pater
Il faut avouer que les choses n’étaient pas faciles pour lui. Car, avant même qu’Etienne Tshisekedi ne se prononce sur le membre de l’Udps à désigner au poste de Premier ministre, Félix Tshisekedi a pris lui-même les devants. «Je vous dis très franchement : si la mission m’est proposée, je ne dirai pas non. Je me bats depuis longtemps et je suis dans la politique depuis très longtemps. Je suis cadre du parti depuis plus de 20 ans et je crois que j’ai mon idée ce que peut être la république. Je pense, sans prétention aucune, pouvoir être un bon premier ministre… », a-t-il déclaré. C’était le 10 janvier 2017.
On a constaté de sa part une baisse d’entrain. Jusqu’au 24 janvier 2017, il est devenu moins insistant. Comme s’il n’a pas réussi à arracher le OK du pater.
Le fait, d’ailleurs, pour Rassemblement de le désigner comme Premier ministre sans s’appuyer sur un prétendu acte signé par Etienne Tshisekedi est la preuve indiscutable de l’inexistence de l’acte de désignation. Effectivement, une délégation du « Rassemblement » s’est rendue le 16 février 2017 au siège de la Cenco pour transmettre ses propositions pour la primature et la présidence du Conseil des sages. Elle n’avait pas sur elle le document établi par le lider maximo.
En s’abstenant de le faire pour son fils ou pour un autre, le Sphinx a certes confirmé sa réputation d’homme imprévisible. Mais, surtout, il a mis ses compagnons de la 25ème heure devant leurs responsabilités. Pour peu qu’il soit vraiment constitué de Sages, le Conseil serait bien inspiré à proposant plusieurs candidats.
Selon le vœu d’Etienne Tshisekedi…
Omer Nsongo die Lema avec Le Maximum