Lorsqu’il quitte Kinshasa le 24 janvier 2017 par avion médicalisé, le ‘lider maximo’ de l’UDPS vient de passer sept mois sous une forte pression politique dans la capitale. On se souvient qu’il y était revenu par avion médicalisé le 27 juillet 2016. Les images de son arrivée à l’aéroport de N’Djili, de son meeting du 31 juillet Bd Triomphal, de son apparition aux funérailles des victimes des incidents du 19 et du 20 septembre au siège de l’Udps mais surtout de son message du 20 décembre démontrent amplement la dégradation continue de son état de santé. Qu’à son retour à Bruxelles il ait été acheminé au pavillon du quatrième étage des Cliniques d’Europe Ste-Elisabeth à Uccle offrant «des soins performants et appropriés aux patients atteints de maladie incurable et en fin de vie…», constitue la preuve qu’à l’instar de sa famille biologique, nombre de membres de sa famille politique au niveau le plus élevé savaient la fin du sphinx de Limete inéluctable mais avaient gardé secrète l’information. Parmi ces derniers, un certain Raphaël Soriano Katebe Katoto, demi-frère de Moïse Katumbi, accusé ouvertement par le tshisekediste Blanchard Mwamba d’avoir tué le lider maximo…
D’abord, un mot sur l’établissement médical dans lequel le président de l’UDPS a rendu l’âme. Sur la page d’accueil de son site web, la première information est la suivante : «Les Cliniques de l’Europe (www.cliniquesdeleurope.be) constituent la plus grande entité hospitalière privée de Bruxelles, avec 715 lits agréés et 150 lits ‘one day’, près de 300 médecins et 1600 collaborateurs répartis sur ses deux sites (Ste-Elisabeth à Uccle et St-Michel à Etterbeek). Les Cliniques de l’Europe disposent d’un socle financier solide qui nous permet d’acquérir des technologies médicales de pointe et de poursuivre le développement d’infrastructures répondant aux besoins d’accueil et de soins de nos patients et de leurs proches. ». En cliquant sur «Soins palliatifs», l’information qui apparaît est celle-ci : «Objectifs et fonctionnement des unités de soins palliatifs : Offrir des soins performants et appropriés aux patients atteints de maladie incurable et en fin de vie, tel est le projet partagé et défendu par l’ensemble de nos professionnels de santé et de nos bénévoles. Ensemble, nous voulons permettre à ces patients une fin de vie dans la dignité et le respect de leurs convictions. Ensemble, avec l’aide de leurs proches, nous tâchons de les accompagner au quotidien dans leurs difficultés, leurs angoisses. La lutte contre la douleur y est une urgence et une priorité. Les moyens thérapeutiques actuels nous permettent heureusement d’en soulager la grande majorité des malades».
Détourner l’attention de l’opinion sur l’Anr…
C’est ici que l’affaire Katebe Katoto révèle toute son importance étant donné que l’un des modérateurs de la rencontre de l’opposition anti-Kabila de l’île de Gorée (Sénégal), spécialiste des questions militaires et sécuritaires de la RD Congo, est en train d’orienter les soupçons sur l’Agence nationale des renseignements de la RDC via son admnistrateur-général, le Katangais Kalev Mutond.
Sous le titre « qui a tué Tshisekedi ? », un quotidien de Kinshasa paru le 6 février 2017 fait cette observation : «Katebe Katoto dénonce une campagne d’intoxication qui vise à diviser le Rassemblement et invite les auteurs d’arrêter les déclarations diffamatoires». L’auteur de l’article se veut précis : « Raphaël Katebe Katoto est profondément choqué d’avoir perdu un grand ami, un grand frère, le président du Rassemblement avec qui il a travaillé. L’homme qu’il portait dans son cœur. Avant son retour à Kinshasa, pendant sa convalescence il le visitait chez lui à la maison et lui portait assistance. Mr Katebe s’est naturellement présenté à la réception de la clinique Ste Elisabeth vers 10h, la réception a indiqué le 4eme étage chambre 488 pour aller au pavillon soins palliatifs. L’accès au Pavillon soins palliatifs est contrôlé et sécurisé. Mr Katebe a dû sonner et une infirmière qui est venue pour l’accompagner auprès du patient de la chambre 488. L’infirmière a ouvert la porte du pavillon verrouillée et l’a accompagné à la chambre 488 qui était aussi verrouillée. L’infirmière a ouvert la porte avec son badge et était présente pendant la rencontre qui a été très brève (environ 2 minutes). Le président Tshisekedi était tout seul sans aucun membre de la famille. Il a constaté l’état de santé de son ami qui s’était détérioré, en sortant de la clinique il a directement téléphoné à monsieur l’abbé Theo, secrétaire du président Tshisekedi, pour l’informer de l’état inquiétant du président ».
Dans le chapeau de cet article, le quotidien note : « Dans un message posté sur son compte facebook, le frère aîné de l’opposant Moïse Katumbi dénonce une campagne d’intoxication qui vise à le salir et semer la division au sein du Rassemblement. Monsieur Blanchard Mwamba dit-il, ainsi que ses partisans doivent arrêter les déclarations diffamatoires. Il est vraiment triste et malheureux pour nous d’en arriver à ce genre de déclaration a-t-il ajouté ».
Le tshisekediste Blanchard Mwamba étant pointé du doigt, la tentative du modérateur de la rencontre de l’île de Gorée de détourner l’attention de l’opinion sur l’Anr est tout ce qu’il y a de malsain.
Choix inverse…
Au fait, il y a fuite de responsabilité dans le chef de ceux qui ont « managé » le lider maximo, au propre comme au figuré, de près ou de loin. Membres de famille, acteurs politiques et sociaux, partenaires extérieurs, belges en particuliers, savaient cet homme très malade. En 2002 déjà, à Sun City, par exemple, il ne pouvait embarquer sans aide en voiture ni en débarquer. Il ne pouvait non plus monter seul les marches d’un escalier ou en descendre. Pendant la campagne électorale de 2011, à peine pouvait-il rester debout une vingtaine de minutes pour tenir un meeting. Tout le monde avait craint le pire lorsque, le 20 juin 2014, il avait été évacué en catastrophe sur Bruxelles par avion médicalisé. A l’ouverture du conclave de Bruxelles-Genval en 2016, il marchait très difficilement.
Et pendant son séjour à Kinshasa, on lui a fait expressément manquer ses rendez-vous avec son équipe médicale, sous prétexte de « veiller sur la matérialisation de l’accord de la Saint Sylvestre », comme si cette mission qui sera de toute façon maintenant accomplie par un autre Congolais avait plus d’importance que sa propre vie.
On peut alors l’affirmer : Etienne Tshisekedi a été instrumentalisé par les siens et particulièrement par des Opposants de la 25ème heure et leurs mentors étrangers, les uns pour se positionner au sein de l’Udps, dans les institutions et dans une reconfiguration géopolitique mondiale où certains pays européens voient venir non sans appréhension l’heure de la décadence. En témoignent les préalables que, toute honte bue, certains alignent aujourd’hui pour les funérailles du défunt chef de l’UDPS : nomination du Premier ministre même si l’investiture de son gouvernement ne pourra, le cas échéant, intervenir qu’au-delà du 15 mars 2017, enterrement au Palais du Justice (sic !) ou sa proclamation comme Héros National (par l’« illégitime » Joseph Kabila !), toutes choses qui refléterait « l’opinion du peuple »…
Cet assaut de cynisme et d’inhumanité a quelque chose d’irrévérencieux, d’indécent et de malpropre. Hélas, là où le respect dû à cet homme impose la dépolitisation des funérailles, on assiste plutôt à la «montée» en puissance du choix inverse : la marchandisation politique de sa dépouille.
Déficit de communication
Maintenant que l’irréparable s’est produit, reconnaissons humblement que l’agitation des uns et des autres résulte de cette évidence : la communication n’a pas été correctement assurée autour de l’évolution de l’état de santé du lider maximo de l’UDPS, et qu’elle l’est davantage moins autour des funérailles.
Pourtant, comme relevé ci-dessus, l’acheminement du malade à la section des soins palliatifs réservés aux patients souffrant de maladies incurables et en fin de vie devait nécessiter, au regard de la stature du personnage, la publication, jour après jour, du bulletin de santé d’Etienne Tshisekedi. Après tout, l’UDPS l’avait exigé des proches de Mobutu, lorsqu’il avait subi une opération chirurgicale à Nice et de ceux de Mzee Laurent-Désiré Kabila, victime d’un attentat à Kinshasa en 2001 et présenté comme se trouvant entre la vie et la mort. Normal : ce parti a habitué les Congolais à réclamer des autres ce qu’il ne s’applique jamais lui-même. Le résultat déplorable est le fort déficit de communication préjudiciable à tout le monde, même aux Cliniques Sainte Elisabeth dont l’équipe de sécurité « aurait laissé entrer furtivement » le visiteur Raphaël Soriano Katebe Katoto, coupable en réalité d’avoir révélé à l’opinion qu’il a trouvé son vieil ami tout seul, mourant abandonné de tous ses proches dans une chambre VIP…
Omer Nsongo die Lema & Le Maximum