Alors que le programme de ses funérailles n’a pas encore été officiellement arrêté, une large frange de l’opinion de la capitale de la RD Congo aurait souhaité que le deuil de « Ya Tshitshi » commence aussitôt que sa mort a été annoncée le 1er février 2017. Mais une autre question fait aussi débat. Comment immortaliser l’ancien Premier ministre et ex-futur président du Conseil national de suivi de l’Accord du 31 décembre dernier ?
Houleux débats, jeudi 2 février avant-midi sur la place Victoire parmi les « parlementaires debout », ainsi qu’on appelle les partisans de l’Udps qui discutent politique à longueur de journée aux lieux de ventes des journaux. Tout est parti d’un ballon d’essai lancé par un chargeur (se dit des jeunes gens qui convient des passagers à monter dans tel ou tel taxi ou minibus) qui a désigné comme par enchantement le boulevard Triomphal du nom d’Etienne Tshisekedi. C’en est suffi pour susciter une vive polémique. Sept fois Premier ministre, ancien PDG de l’ex-Air Zaïre, ambassadeur, etc., Tshisekedi n’a pas pour autant réussi à imprimer son nom sur une bâtisse ou une artère de Kinshasa. Alors que André Kimbuta, le gouverneur de la ville-capitale de la RD Congo depuis seulement 2006, a baptisé de son nom un boulevard dans la Tshangu et une voie secondaire dans la commune de la Gombe, lâche un passager.
«A Kintambo, l’ancien Premier ministre Mobutu, Lunda Bululu, a réussi à faire accoller son nom au pont jeté sur la rivière Makelele », rappelle à demi-mot cet agent de circulation routière. «Celui qui nous a ouvert les yeux, ne mériterait pas mieux?», lance-t-il, ému, en s’éloignant. Pour ce jeune coiffeur, qui a mis en berne son drapelet planté au coin de son petit salon de coiffure, « Tshisekedi vaut autant que l’indépendance … surtout que cette indépendance a encore un arrière-goût de colonialisme », estime-t-il. Avant de poursuivre, « Pour moi, le boulevard du 30 juin devrait être débaptisé Ya Tshisthi». Et la discussion attire davantage des debaters : quelle grande infrastructure de la capitale débaptiser au nom d’Etienne Tshisekedi wa Mulumba ? Pour bon nombre de personnes, une voie routière serait appropriée. Et l’ex-avenue du 24 novembre devenue Libération au lendemain de l’avènement de l’AFDL retient l’assentiment de beaucoup. « C’est pour rappeler toute sa lutte contre la dictature de Mobutu et la négation de la démocratie que nous vivons», tranche ce médecin. Et son voisin de soutenir que l’aéroport international de N’djili serait approprié pour porter le nom du «père de la démocratie» ; selon lui, d’autant plus que N’djili n’est qu’une rivière. Tout un débat.
NADINE KINGOMBE