Baptême de feu …plutôt de larves, pour Marie-Ange Mushobekwa. Quand dans la nuit du 19 au 20 décembre, sa désormais ex-consœur de la presse présidentielle, Angèle Kanam citait son nom parmi les membres de la nouvelle équipe gouvernementale, au portefeuille des Droits humains, des accrochages épars étaient déjà rapportés dans les quartiers populaires et miséreux de la capitale entre forces de l’ordre et jeunes manifestants présentés soit comme inciviques soit comme étant à la solde des partis de l’opposition coalisés au sein du Rassemblement des forces politiques et sociales acquises au changement. Neuf personnes ont perdu la vie, essentiellement à Kinshasa, suite aux manifs du 19 et 20 décembre, selon le gouvernement.
Là où le département des Droits humains de la Monusco (Mission des Nations Unies pour la Stabilisation de la RD Congo) avance un pré-bilan de 19 morts, plusieurs blessés ainsi que plus de 100 arrestations à Kinshasa. Sans documenter le moindre de ces cas dramatiques. Par ailleurs, à Lisala, au moins 17 morts ont été dénombrés lors du déguerpissement forcé par la police d’une secte qui se réclame du kimbanguisme, et qualifiée plutôt de milice par l’autorité provinciale. Des élus nationaux de la province de la Mongala ont déjà donné de la voix, parlant de graves violations des droits humains. Une question orale avec débat, a-t-on appris, serait en gestation. Son auteur attendrait impatiemment que le gouvernement soit investi par l’Assemblée nationale pour saisir Aubin Minaku.
Des pressions, des SOS, Marie-Ange les recevra, nul doute, de toute part…par ces temps d’agitation sociopolitique consécutive à la fin du mandat constitutionnel de Joseph Kabila, que la Cour constitutionnelle avait pourtant vidé de toute équivocité. Certes, la nouvelle ministre n’a jamais officiellement exercé le plus petit mandat politique, mais pour ceux qui la connaissent, Marie-Ange, Néné comme on l’appelait dans son adolescence, n’est point du genre à trembloter devant une vocifération d’où qu’elle vienne. Bien au contraire, elle sait aussi monter les enchères, à en croire cette anecdote : Marie-Ange aurait menacé de brandir, sur la place publique, la carte de baptême d’un ancien proche du Chef de l’Etat passé depuis à l’opposition comme pour « dénuder » sa nationalité. Femme de caractère, elle a piqué une sainte colère au point d’envisager de saisir la justice quand l’artiste musicien Koffi Olomide s’est payé la liberté de la citer dans une de ses chansons, dans le contexte on ne peut plus emballant des fameux « libanga » dont s’enamourent pourtant les décideurs r-dcongolais, et alors même que (feu) son mari, Claudien Lukulia, se laissait immortaliser dans une chanson du même artiste, Koffi Olomide. Maniaque des libertés individuelles et collectives, Marie-Ange Mushobekwa s’est défendue, bec et ongles, selon une source de l’Ambassade des Etats-Unis, lorsqu’elle a été appréhendée par les services pour avoir conduit une équipe de journalistes à Kigali en marge d’une cérémonie officielle en mémoire des victimes du génocide rwandais de 1994. L’alors présentatrice de l’émission sociopolitique, « à cœur ouvert », sur la chaine privée AA (Antenne A) avait, à son retour de la capitale, été internée à l’Hôtel Memling pour interrogatoire en compagnie de (feu) son mari. Au nom de la liberté d’informer et de l’information, elle se brouillera notamment avec les Bemba suite à une rediffusion répétée d’un « Cœur ouvert » avec feu Bemba Saolona au cours duquel il sermonnait son fils Jean-Pierre, devenu rebelle à la tête du MLC, Mouvement de libération du Congo. En 2011, suite au désordre et au maquillage des résultats de la présidentielle et des élections législatives, elle imposera à la CENI l’épreuve de la vérité des chiffres à la circonscription des Basoko, dans l’ex-Province orientale où son mari n’avait pas été réélu malgré les scores satisfaisants repris dans les PV des bureaux de vote. Ce fut le choc frontal avec la MLC, ex-UDPS, Eve Bazaïba. Sans succès. Mais Marie-Ange aura gagné en fair-play et en capacité d’encaisser des coups, de tomber et de se remettre au combat…même sans le coaching de Claudien Likulia qui décède, quelques années peu après. Elle reprend la direction du MCN, Mouvement pour la cohésion nationale, un parti politique agréé en 2010. Soucieuse de l’unité de la nation r-dcongolaise, Mme Mushobekwa prend part active au Dialogue de la Cité de l’UA d’où découle le gouvernement d’union nationale dirigée par Samy Badibanga. Ils devraient donc déchanter assez tôt, ceux qui estiment, peut-être en se référant à la mésaventure survenue à un certain vice-ministre du Plan, lors de la mise en place du gouvernement des Concertations nationales, que Mushobekwa ne fera se contentera de faire de la figuration, genre « sois belle et tais-toi ». Belle, la nouvelle titulaire du portefeuille des droits humains l’est, mais pas seulement.
POPOL KALOMBO