Ce n’est vraiment plus qu’un secret de polichinelle : les radicaux de l’opposition réunis sous la bannière du Rassemblement tshisekediste-katumbistes des forces politiques et sociales acquises au changement se sont déjà rendus à l’évidence : pas de gestion de la RD Congo sans Joseph Kabila avant la prochaine présidentielle. C’est la concession essentielle arrachée par la CENCO à la plateforme créée à l’instigation des libéraux belges à Genval près de Bruxelles il y a quelques mois. En échange de ce qu’on a tendance à présenter comme une concession, mais qui en fait correspond bien aux prescrits de la constitution en vigueur en RD Congo, les radicaux avancent un chapelet d’exigences qui tournent, toutes, quasiment autour du dépouillement du Président de la République de tout ou partie de ses prérogatives régaliennes. Une sorte de mise en congé partielle qui voudrait que Joseph Kabila annonce publiquement qu’il ne briguera pas un 3ème mandat consécutif à la tête du pays ; que la présidentielle soit organisée à une date précise en 2017 ; que Joseph Kabila déclare (encore !) que la constitution ne sera pas révisée et qu’il ne se tiendra pas de referendum constitutionnel ; la période charnière d’ici la tenue des élections doit être co-gérée avec l’opposition tshisekediste-katumbiste (le bon vieux partage équitable et équilibré du pouvoir déjà réclamé au défunt Maréchal Mobutu) fifty-fifty (surtout en ce qui concerne les ministères régaliens que sont l’intérieur, les affaires étrangères, la défense, la justice, mais aussi les services de sécurité, les entreprises publiques et les institutions d’appui à la démocratie) ; que Joseph Kabila nomme un premier ministre issu de l’opposition qui n’a pas participé au dialogue de la Cité de l’OUA ; et enfin, qu’au bas d’un nouvel accord à intervenir sous les auspices des Etats-Unis, que ce soit Joseph Kabila qui appose sa signature et non plus son directeur de cabinet.
Il y a, certes, beaucoup à redire de ces exigences qui posent en premier lieu le problème de leur légitimité : même en admettant qu’au 19 décembre 2016, Joseph Kabila cesse d’être légitime, il n’en demeure pas moins qu’il sera toujours, légalement, Président de la République et Chef de l’Etat. C’est ce que stipule la constitution. Et les autres ? D’où un regroupement d’opposants créé par les belges tire-t-il la légitimité et la légalité de ses exigences, qualifiées non sans quelque pertinence par certains de putschistes ?
De même qu’il faut trouver un nom ou une qualité, qui ne heurte pas la constitution en vigueur en RD Congo, à la personnalité qui co-gérera le pays délestée des ministères régaliens comme les affaires étrangères (la politique étrangère du pays confiée à l’opposition d’ici les prochaines élections ?) ; qui signe un accord politique interne sous le contrôle d’un pays étranger, fût-il américain … qui répète qu’il ne modifiera pas la constitution alors même que certaines exigences des mêmes opposants le confine à le faire en leur faveur …
Encore que l’on voit mal comment et pourquoi le Chef de l’Etat, qui a déjà nommé un premier ministre dont l’appartenance à l’opposition n’a pas été contestée par quiconque, nommerait un autre opposant juste pour faire plaisir aux radicaux qui avaient boudé les assises de la Cité de l’OUA.
En fait, l’opposition, grande gagnante du dialogue politique de la Cité de l’OUA, n’avait plus rien à revendiquer, estime un député de la majorité présidentielle interrogé par Le Maximum. Pour qui le reste se réduit en « stratégies pour dénuder complètement le Président de la République. Rien de plus ».
En attendant la réaction de Joseph Kabila, qui devrait lui-être transmise par les évêques catholiques de la CENCO, c’est au sein parmi les radicaux que le torchon brûle, déjà. Les revendications du rassemblement tshisekediste-katumbiste, œuvre d’une commission (des stratégies) spécialement mise sur pied pour ce faire, ont subrepticement fuité … dans la presse. L’affaire n’a pas arrangé le noyau udpsisant de la plateforme genvaliste qui a fait fuiter le week-end dernier une sorte de démenti récusant les propositions transmises jeudi dernier à la CENCO. Samedi soir, Félix Tshilombo Tshisekedi a pris sur lui de dénoncer le contenu des propositions transmises aux évêques, assurant que le Conseil des sages du Rassemblement ne se reconnaissait pas dans ces propositions. Et provoqué l’ire de Christophe Lutundula qui a également réagi sur tweeter : « … conseil des sages du Rass ne s’est jamais réuni pour désapprouver propositions contenues du document ni nos signatures », a-t-il posté. Subtile manière de rappeler au jeune Félix Tshisekedi que la nouvelle plateforme était une plateforme, pas le parti politique de Papa.
J.N.