Ceux qui ont connu l’ancien Institut Technique de Lodja, en province du Sankuru, il y a à peine une dizaine d’années ne s’y retrouveraient plus aujourd’hui. Ce joyau national de l’enseignement technique secondaire, œuvre de la colonisation, n’est plus que ruine et décombre ! Pourtant, cette institution d’enseignement technique secondaire a compté jusqu’à il y a quelques années encore, parmi les quatre meilleures de la RD Congo au plan infrastructurel. Ses ateliers et ses tours mécaniques, dont on ne sait par quelle magie coloniale ils ont été acheminés et implantés là, seuls l’institut technique de la Gombe et l’un ou l’autre établissement d’enseignement du genre en RD Congo, en possèdent. L’Institut technique de Lodja, c’est l’alma mater de personnalités comme l’ancien PDG de la Regideso, Monsieur Tshiongo Tshibi Kubula Ntumba, bien connu au pays et à l’étranger pour ses performances particulières. L’ex. Itelo, en effet, c’était une école secondaire technique et professionnelle qui assurait la formation des mécaniciens automobile, de maçons en quelque 4 ou 5 ans de formation post primaire. Mais aussi et surtout, des diplômés du secondaire en mécanique générale et en construction, destinés à l’enseignement supérieur et universitaire.
L’ex Itelo avait été conçu pour s’auto-suffire, largement. Les bâtiments de l’école, les meilleurs de Lodja et sans doute de la province du Sankuru, avaient été construits avec le concours des enseignants et les élèves des cycles professionnels eux-mêmes. Jusqu’aux années ’80, certaines salles de classe valaient bien les meilleurs auditoires d’universités : tableaux, pupitres en fer et autres y étaient localement produits.
Seulement, depuis quelques années, l’ex. Itelo est progressivement et comme méthodiquement pillé. L’institut a beau être géré par l’Eglise catholique locale depuis les années ’70 dans lecadre des convention entre l’Etat et certaines congrégations religieuses, rien n’y fait. Le pillage du patrimoine de l’institution a atteint le seuil de l’intolérable au mois d’août 2016, lorsqu’une charpente métallique de plus de 45 m s’est volatilisée en une nuit comme par enchantement. Inconsolable et larmoyant, un vieil enseignant de l’Itelo aujourd’hui à la retraite a dit sa douleur au correspondant du Maximum à Lodja : « Une charpente métallique de cette dimension, c’est la bagatelle de 100 cornières », explique-t-il, sûr de son fait. Les subtiliser ne peut en aucune manière passer inaperçu, ni s’opérer sans complicités des autorités administratives locales et scolaires (cléricales) qui gèrent ce joyau de l’enseignement technique secondaire en lieu et place de l’Etat. C’est pourtant ce qui s’est fait à Lodja. Au vu et au su desdites autorités.
Depuis le mois d’août, aucun écho de quelque enquête diligentée par les autorités judiciaires, le parquet secondaire près le tribunal de paix de Lodja semble frappé d’autisme devant ce véritable crime contre la jeunesse congolaise. « Ces 45 mètres de charpente métallique dans une contrée qui ne compte aucune bâtisse susceptible de la porter, ne semblent pas préoccuper outre mesure l’officier du ministère public chef du parquet de cette entité, sans doute trop occupé à pourchasser les creuseurs et trafiquants de pierres précieuses en délicatesse avec le fisc dans cette région réputée pour la qualité de ses diamants. Enquêter sur la cannibalisation d’une école ne rapporte pas grand chose », ironise une enseignante, membre par ailleurs du comité local de l’association des parents d’élèves.
Mais le plus surprenant, c’est peut-être ce silence quasiment complice de la hiérarchie de l’Eglise catholique dont un prêtre nommé par Mgr. Nicolas Djomo évêque du lieu préside aux destinées de l’Itelo, de ses élèves et des étudiants de l’Université des sciences et des technologies de Lodja, implantée dans le voisinage de l’Isita (ex-Itelo) pour recevoir les élèves diplômés de cette belle école secondaire technique menacée de disparition, eux qui sont d’ordinaires si prompts à monter sur les grands chevaux au moindre dysfonctionnement. Rien. Pas un mot de pipé. Même pas contre les constructions anarchiques qui rognent la concession de l’ex Itelo et compromettent tout autant son avenir et l’avenir de la jeunesse locale. Rien.
J.N.