Le 21 septembre 2016, le Procureur Général de la République a émis la réquisition d’information n°6244/D023/42659/PGR/SAK/2016 portant interdiction de sortie du territoire national à Joseph Olenghankoy, Kitenge Yesu, Franck Diongo, Lisanga Bonganga, Ingele Ifoto, Jean-Marc Kabund, Willy Mishiki, Martin Mukonkole, Sama Lukonde Kyenge et Bruno Tshibala. Il y est précisé : «Tous nationalité congolaise (-) poursuivis pour mouvement insurrectionnel (-) En cas de découverte (-) Les appréhender et les acheminer sous bonne escorte à l’EGM (-) Exécution sans faille (-). » Dernier cité sur ce document, premier cependant à vouloir quitter le pays par l’aéroport international de N’Djili, Bruno Tshibala a été appréhendé la nuit du mardi 11 au mercredi 12 octobre 2016. Il est écroué à la prison centrale de Makala. Deux autres opposants visés tentent de sortir pour l’étranger : Franck Diongo (il a écrit le 12 octobre dernier à la DGM) et Willy Mishiki (il s’est exprimé le même jour sur Radio Okapi en qualifiant de « provocation » l’exécution de cette réquisition)…
Harponné comme un collégien à l’aéroport international de Ndjili, on peut se demander si Bruno Tshibala s’attendait à être appréhendé lorsqu’il s’est présenté devant le guichet de la DGM et s’il n’a pas agi par défi. La célérité avec laquelle les médias périphériques ont réagi à cette interpellation dans la nuit du 9 au 10 octobre 2016 incite à croire qu’il s’agit d’un défi osé, certainement avec le soutien de la haute hiérarchie de son parti. Bruno Tshibala s’est présenté à l’aéroport pour «tester» la capacité des autorités judiciaires de réagir.
Au-delà de toutes les péripéties qui ont émaillé ses heures de détention entre les mains de l’organe de la loi, le résultat obtenu est l’exécution du mandat d’arrêt provisoire (Map) émis à son attention et à son intention.
Comme pour conjurer son sort, le MLP Franck Diongo a choisi d’écrire non pas au PGR, mais au chef de la Dgm, une «Demande de notification de la réquisition d’information du PGR et dénonciation de la-violation des droits et libertés parlementaires». Il l’introduit en ces termes : «En ma qualité de Député National, Président du Mouvement lumumbiste Progressiste, MLP en sigle, Parti politique de l’Opposition et l’une des victimes des sanglants évènements des 19 et 20 septembre dernier dont le siège a été nuitamment détruit par bombes incendiaires et autres militaires, j’ai, en date du 21 septembre 2016 par voie de plainte, saisi Monsieur le Procureur Général de la République qui, du reste, a ouvert un dossier à son office pour une enquête judiciaire».
Il a fait constater à la DGM qu’en dépit de sa «qualité de Député national», son nom «figure illégalement sur la réquisition» lui notifiée par le PGR. Il a déploré l’interdiction qui lui est faite «de sortir du territoire national, et ce, au mépris total» de ses immunités parlementaires et des instruments «instruments juridiques tant nationaux qu’internationaux en la matière». Frank Diongo invoque à sa rescousse les alinéas 2 et 3 de la Constitution du 18 février 2006 selon lesquels «Aucun parlementaire ne peut, en cours de sessions, être poursuivi et arrêté, sauf en cas de flagrant délit, qu’avec l’autorisation du Bureau de l’Assemblée Nationale ou du Bureau du Sénat selon le cas » et qu’«En dehors de session, aucun parlementaire ne peut être arrêté avec l’autorisation du Bureau de l’Assemblée Nationale ou du Bureau du Sénat, sauf en cas de flagrant délit, de poursuites autorisées ou condamnations définitives».
Bien plus, il s’est appuyé sur les alinéas 1 et 2 de l’article 94 du Règlement intérieur de l’Assemblée Nationale selon lesquels «Le Député a le droit de circuler sans restriction ni entrave à l’intérieur du territoire national et d’en sortir. Aucune mesure, qu’elle soit du bureau de l’Assemblée Nationale ou de toute autre autorité ne peut avoir pour effet de porter atteinte au droit de libre circulation du Député. Seuls sont admis, à l’occasion du déplacement d’un Député tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays, les documents administratifs constatant sa qualité et le voyage à effectuer».
Ce qu’il s’est abstenu cependant de dire dans sa lettre adressée à une autorité non compétente pour décider à la place de l’autorité judiciaire, c’est qu’il n’est pas, lui, l’objet d’arrestation du moment qu’il ne s’est pas encore présenté à un poste frontalier !
Il sait davantage, en tant que législateur, que le fait pour lequel il est cité dans la réquisition d’information du PGR est le mouvement insurrectionnel. Ni la Constitution, ni le Règlement intérieur de l’Assemblée nationale ne lui garantissent l’immunité pour ce délit-là !
Sur ces entrefaites, Willy Mishiki va se faire rappeler au souvenir de l’opinion. Dans une déclaration à www.radiookapi.net, il commence par faire remarquer que l’exécution de la réquisition du PGR «risque de briser le pacte républicain et pousser vers le radicalisme», avant de relever qu’«Il y a des personnalités qui sont sur cette liste mais qui n’ont jamais pris part à cette marche et qui n’ont jamais appelé à la mobilisation mais qui sont innocemment citées». Comme pour affirmer l’existence des personnalités ayant pris part à la marche et ayant appelé à la mobilisation pour une manifestation qui a dérapé !
Il s’est tu…
Ainsi, à ce jour, en dehors de Joseph Olenghankoy, Kitenge Yesu, Lisanga Bonganga, Ingele Ifoto, Jean-Marc Kabundu, Martin Mukonkole et Sama Lukonde Kyenge, on constate que trois autres personnalités concernées par la réquisition d’information veulent sortir du pays : Bruno Franck Diongo, Willy Mishiki et Tshibala.
Cette ruée vers l’étranger doit interpeller l’opinion. Car, elle survient à une dizaine de jours de la grande manif du 19 octobre 2016 dont les préparatifs exigent, normalement, leur présence dans la capitale.
En cherchant justement à quitter le pays à cette période précise, c’est finalement à la «rue acquise au Rassemblement» de se sentir interpellée la première. C’est à elle de se demander pourquoi les meneurs semblent prendre la poudre d’escampette au moment d’en découdre véritablement avec la Majorité présidentielle.
En cherchant vraisemblablement à se mettre à l’abri à l’étranger – car c’est cela l’objectif visé – les chefs des partis membres de «Rassemblement» ne rassurent nullement la base. Preuve, si besoin est, qu’ils sont sur un autre schéma que celui de l’inclusivité du Dialogue.
Il va de soi que la «rue kinoise» attend la concrétisation, par ses leaders, de la promesse faite de se constituer en prisonniers par solidarité avec Bruno Tshibala. Il reste à s’en rendre compte : jusqu’au moment où cette chronique est mise en ligne, personne n’a encore signalé sa présence à l’office du PGR pour se faire délivrer un mandat d’arrêt provisoire et se constituer prisonnier.
Au contraire, 48 heures après l’ultimatum retentissant donné sur TV 5 au PGR, Jean-Marc Kabund semble avoir avalé sa langue !
Il s’est tu…
LE MAXIMUM AVEC Omer Nsongo die Lema