La publicité passe en boucle sur la télévision privée ” Kin 24″, réputée propriété du Gouv. de la capitale, André Kimbuta. Elle parle d’un projet des logements sociaux dans la partie Est de la ville province de Kinshasa. Il faut débourser entre 29.000 à 40.000 dollars pour devenir propriétaire de ce logement dit social. Ce prix est jugé par bon nombre d’observateurs trop élevé au regard du pouvoir d’achat de la population. Dans un pays où la majorité est en chômage et évolue dans l’informel. En clair, le petit peuple ne pourra jamais acheter une seule maison de cet ambitieux projet qui devrait en réalité tenir compte du pouvoir d’achat de la population.
A Kinshasa, de nombreux Kinois souhaitent que ce projet des maisons préfabriquées ne s’arrête pas à mi-parcours. D’autant plus que les difficultés de logement se posent avec acuité. A Kinshasa, en effet, trouver une maison en location est un parcours du combattant. En fait, depuis plus de 40 ans, l’Etat n’a plus construit des logements pour la population. Et il envisage d’en construire plus de 40.000 dans les prochaines années.
Selon les experts de l’habitat, le déficit en logement est actuellement de l’ordre de 3.500 habitations par an. Du coup, le problème du logement à Kinshasa est devenu un phénomène de surenchère commerciale, mais aussi d’humeur entre propriétaires et locataires. En 1950, quand la population de Kinshasa est passée à 50.000 habitants, il s’est posé le problème de logements sociaux, rappelle un expert de la ville. C’est ainsi que les “nouvelles cités plus ou moins urbanisées ont été construites : Matete, Bandalungwa, Lemba, Ngiri-Ngiri, Kasa-Vubu, etc, pour résorber la demande’’.
Puis, sont apparues les menaces de chômage et les difficultés sociales. Au point que le ministre de l’Intérieur de l’époque avait freiné l’immigration vers la ville de Kinshasa. En 1967, il y a eu un plan d’urbanisation qui prévoyait de limiter la population de la capitale à 2,5 millions d’habitants. Aujourd’hui, cette population est estimée à Kinshasa à près de 12 millions d’habitants. “Nous allons atteindre 25 millions d’habitants avec la majorité de ceux qui seront encore en vie d’ici 2020. Que les autorités compétentes reprennent les choses en main“, avertissent les experts de la ville.
CASSE-TETE
L’application stricte du contrat de bail à Kinshasa est toujours un vœu pieux. Jusqu’à ce jour, les locataires continuent à subir toutes sortes de tracasseries de la part de leurs bailleurs qui font fi des textes légaux en la matière. Les conflits opposant les bailleurs aux locataires finissent plus souvent dans les cours et tribunaux. Durant l’année 2009, par exemple, le Parquet de Matete, les différents commissariats de police de cette commune avaient enregistré plusieurs dizaines de plaintes venant des locataires contre leurs bailleurs pour mauvais traitement de la part de ces derniers.
Dans plusieurs cas, ce ne sont même pas les bailleurs eux-mêmes qui infligent ce mauvais traitement aux locataires. Mais leurs conjoints, leurs enfants ou toute autre personne qui a des liens familiaux avec eux. Ce qui est bien sûr une grande humiliation pour les locataires concernés.
L’explosion démographique de Kinshasa, ville qui en 1960 comptait moins d’un million d’habitants et qui aujourd’hui en compte plus de 12 millions, a rendu le problème de logement très ardu et quasiment insoluble. Actuellement, les maisons libres sont devenues une denrée rare et c’est au bout de mille démarches que l’aspirant locataire parvient à dénicher, par commissionnaires interposés, une maison ou une chambre à louer.
Il faut évidemment payer la commission qui correspond à un mois de loyer. Lors du marchandage du taux de loyer entre le bailleur et le locataire, ce dernier a très souvent le profil bas parce que c’est lui qui est dans le besoin. C’est donc le bailleur qui souvent impose le taux. Au centre-ville ou dans les autres quartiers suffisamment modernisés, le taux du loyer d’un studio de 9 m2 se négocie autour de 100 dollars. Pour une chambre et un salon, avec des toilettes communes à tous les occupants de la parcelle, le taux du loyer varie entre 80 et 100 dollars.
Le loyer mensuel d’une maison de 2 chambres revient entre 150 et 200 dollars selon le quartier, indique une agence immobilière. “On n’a pas de choix: même si on n’a pas un salaire qui permet de faire face aux taux élevés du loyer, on se fait violence pour trouver un logement afin d’éviter l’humiliation d’être sous-logé“, explique un locataire habitant la cité Maman Mobutu dans la commune de Mont-Ngafula, dans la partie Ouest de la ville de Kinshasa; avant de renchérir que: “On est bien obligé de louer une maison, parce qu’on ne peut pas laisser sa famille passer des nuits entières à la belle étoile’’.
‘’Il faut bien se soumettre aux caprices des bailleurs, quitte à trouver de quoi payer régulièrement son loyer à la fin de chaque mois“, dans un pays où la majorité de la population est sous-payée et vit, comme il se dit à Kinshasa, au taux du jour. Pour trouver de quoi s’acquitter du loyer mensuel, toute la famille est parfois mise à contribution: petit commerce pour l’épouse ou n’importe quel autre membre de la famille. L’une des difficultés que rencontrent les locataires est le fait que très souvent, les bailleurs ne veulent pas entendre parler d’un contrat de bail légalisé qui les obligerait à respecter scrupuleusement les droits du locataire et vice-versa. Par exemple, les trois mois de garantie locative et de préavis. Cela justifie le fait que certains bailleurs obligent les locataires à payer 10 mois de loyer anticipativement. “C’est une violation de la loi“, s’insurge un magistrat.
Dédé Nkay, peintre de son état témoigne: “Un beau soir, sans coup férir, mon bailleur m’appelle pour me dire qu’à partir du mois suivant, le coût du loyer de la maison devrait passer de 100 à 140 dollars et cela sans aucune justification’’. Le gars loue non loin de l’arrêt de l’UPN dans la commune de Ngaliema dans la partie Ouest de la ville province de Kinshasa. Les raisons de cette augmentation, seul le bailleur en détient le secret !
Selon un expert en immobilier, les vraies raisons de l’augmentation des loyers ne sont pas à chercher loin. Pour lui, le coût des matériaux de construction, la dévaluation de la monnaie locale (Franc congolais), la famille du locataire devenue trop grande, les parents venant d’ailleurs, l’ aménagement des lieux seraient à la base de cette situation, fait-il remarquer. Ce sont là entre autres les raisons avancées par les bailleurs pour casser de manière unilatérale le contrat (souvent tacite d’ailleurs et non écrit) de bail avec leurs locataires.
HUMEUR DU BAILLEUR
Les vraies raisons se trouvent souvent aussi ailleurs, par exemple, l’idée de percevoir une nouvelle garantie locative, l’humeur du bailleur, le train de vie de la famille du locataire, voire les préjugés ethniques, etc. “Si les autorités ne font rien pour mettre de l’ordre dans le secteur d’habitat, dans les jours à venir, beaucoup de familles se retrouveront à la belle étoile à cause des caprices de bailleurs qui n’appliquent pas comme il se doit la législation en matière de bail“, tranche à vif un autre locataire.
D’autre part, il faut noter que les mauvais rapports entre les bailleurs et les locataires ne sont pas imputables aux seuls ni à tous les bailleurs. Dans certains cas, ce sont les locataires qui sont à la base de la rupture du contrat de bail pour diverses raisons: non paiement de loyer à terme échu, non respect des installations mises en location, non entretien des lieux, comportement irrespectueux vis-à-vis du bailleur etc, a fait remarquer Jeannine Dikeki Miti, qui fait louer deux maisons de trois chambres chacune dans la localité Kibambe, dans la commune de Ngaliema.
M.R.