Quelques heures ont suffi, mardi 4 octobre 2016, pour que se tienne au siège de l’UDPS/Tshisekedi sur le Petit boulevard dans la commune de Limete, le conclave du Rassemblement des forces politiques et sociales acquises au changement. Le deuxième conclave du genre convoqué par l’opposition dite radicale – ou katumbiste depuis que le richissime affairiste katangais s’en est emparé à la rencontre de Genval dans la périphérie de Bruxelles en Belgique – s’est voulu élargi et populeux. À côté d’entités significatives comme l’UDPS/Tshisekedi et la coalition des 7 partis politiques dissidents de la majorité présidentielle (G7) emmenés par Moïse Katumbi, on a noté la présence d’une noria de groupuscules plus ou moins éphémères dont la dynamique de l’opposition, l’alternance pour la République, le G14, La convention des républicains, la majorité présidentielle populaire, le front du peuple, et même une structure dénommée « les alliés du président Tshisekedi ».
Tout ce beau monde servait davantage à remplir les travées des tribunes de manifestations publiques et à aboyer leur haine de Joseph Kabila devant les écrans des chaînes de télévision kinoises et internationales qu’à mobiliser un électorat digne de ce nom, si l’on en juge selon les résultats des diverses élections organisées en RD Congo depuis 2006. En dehors du vieil opposant radical, Etienne Tshisekedi qui peut prétendre à un électorat sûr dans son Kasaï oriental natal et certaines agglomérations de la RD Congo comme Kinshasa et d’un couple de formations politiques du G7 comme le MSR de Pierre Lumbi, derrière les dénominations pompeuses des participants au conclave de Limete se tiennent des individus dont le capital électoral dépasse rarement 2.000 pauvres voix, hélas, et à la limite un ou deux sièges de député, donc. Et s’agissant des thuriféraires du G7, quoique l’on en pense, même Pierre Lumbi Okongo, le patron du MSR, était le mieux loti du groupe jusqu’à son départ de la majorité présidentielle, puisqu’il pouvait aligner près d’une vingtaine de députés nationaux et provinciaux, l’ancien conseiller spécial en matière de sécurité de Joseph Kabila, que l’on accuse d’avoir instrumentalisé la centrale électorale à son profit à des fins électoralistes, devrait peiner à refaire les pleins électoraux des années passées, son parti politique ayant littéralement implosé comme la quasi totalité des autres du G7. José Endundo Bononge, qui pouvait aligner près d’une dizaine de députés, lui aussi, aura beaucoup perdu en quittant son ancienne famille politique, d’autant plus que cet ancien PDG de l’Office des Routes sous le Maréchal Mobutu et ancien ministre de l’Environnement de Joseph Kabila n’a jamais été vraiment un homme populaire à Mbandaka où les électeurs l’ont envoyé paître lors des législatives de 2011. Les Mwando, père et fils, détenteurs d’une demi douzaine de sièges de députés nationaux, sont restés seuls après que tous les autres élus de leur parti aient sanctionné leur «ingratitude » envers Joseph Kabila, l’enfant de leur Tanganyika natal auquel ils devaient tant. À l’instar d’un autre Nord-Katangais, Gabriel Kyungu wa Kumwanza dont le quota d’élus a été réduit à la portion congrue avant de perdre son « trône » de président de l‘Assemblée provinciale du Haut Katanga. Le reste, c’est du menu fretin : à commencer par Olivier Kamitatu Etsu, élu député de justesse sur les terres maternelles à Bulungu en 2011 grâce au soutien massif de Sindika Dokolo, et dont le parti politique, l’ARC, a également implosé ; en passant par le juriste Christophe Lutundula, qui doit son élection, seul dans son parti, à des manœuvres jugées immorales à Katako-Kombe au Sankuru.
Derrière la dénomination Dynamique de l’opposition se tiennent en réalité des individus qui pèsent au maximum 2 élus, comme l’Ecidé du volubile Martin Fayulu Madidi, ou moins que cela. Parce que le groupe créé à l’initiative de l’UNC Vital Kamerhe est sérieusement fragilisé depuis que cet élu de Bukavu en 2006, candidat à la présidentielle de 2011, a rejoint le camp du dialogue politique en cours à la Cité de l’OUA à Kinshasa.
L’Alternance pour la République, qui regroupe des petits partis politiques de l’opposition récemment « achetés » par Moïse Katumbi ne vaut guère mieux. Ce sont les Franck Diongo et autres Jean-Claude Vuemba, uniques députés élus de leurs partis politiques respectifs qui se donnent de l’envergure derrière une plate-forme qui n’en est donc pas une, réellement. On peut en dire autant de la fameuse Majorité présidentielle populaire. Derrière ce label pompeux se cache en réalité le DC Diomi Ndongala Nzomambu, en détention au CPRK pour une affaire de viols mineures. Candidat à la présidentielle 2006, Eugène Diomi n’a jamais pu glaner plus de voix que celles susceptibles de faire élire un député national pour le compte de son parti en 2011, lui-même. Tandis que la meute de jeunes turcs qui piaffent derrière la dénomination d’Alliés du président Tshisekedi n’est un conglomérat d’opportunistes qui, ayant échoué à se faire élire, tentent de surnager à l’ombre du ‘lider maximo’ de l’UDPS. C’est le cas d’un certain Jean Pierre Lisanga Bonganga.
Mardi 4 octobre 2016, si des discours ont été lus et applaudis et les hymnes exécutés, on n’a guère aperçu le moindre atelier d’échanges d’idées et de discussions sur les sujets à l’ordre du jour comme ce fut le cas à la Cité de l’Union africaine à Ngaliema.
Tout s’est passé comme s’il ne s’agissait que d’un spectacle conçu quelque part avant d’être avalisé par des participants dociles à souhait. Un rapport des travaux du conclave long de 11 pages a bien été rendu public. Mais de travaux proprement dits, personne n’en a vu ni entendu parler. Le discours d’orientation du gourou – facilitateur – modérateur – inspirateur Tshisekedi lui-même n’a même pas duré 4 minutes et s’est limité aux habituelles invectives et propos d’agitation qui constituent sa marque depuis les années Mobutu : le « préavis » donné à Kabila pour quitter le pouvoir, la « lutte contre la peur de ceux qui sont au Camp Tshatshi » et les « cartons jaunes et rouges » (allusion aux désordres et violences de la rue des 19 et 20 septembre et à ceux qu’il projette pour les jours à venir).
A cet égard, le conclave du Rassemblement de l’opposition aura été un monologue, même vis-à-vis des composantes de la plate-forme tshisekediste-Katumbiste.
J.N.