Mercredi 27 juillet 2016, le président de l’UDPS et du comité des sages du Rassemblement des forces acquises au changement, Etienne Tshisekedi wa Mulumba, a effectivement regagné Kinshasa. Après une absence de près de deux ans, pour raisons de santé, Ya Tshitshi comme certains le désignent à Kinshasa, est rentré au pays à bord d’un jet privé qui a atterri à l’aéroport international de Ndjili à 14 H 12’ précises. Avec un peu plus d’une heure de retard sur l’horaire et le programme rendus publics la veille, donc. Le décalage a suscité l’ire de certains caciques de l’opposition qui se sont empressés de crier au complot ourdi par Kabila et son gouvernement. Augustin Kabuya, le secrétaire national de l’UDPS en charge de la communication et attaché de presse d’Etienne Tshisekedi a accusé les autorités aéroportuaires rd congolaises de retarder à dessein l’arrivée de son patron. A l’aéroport de Ndjili où attendaient quelques milliers de partisans, Joseph Olenghankoy des Fonus et du Rassemblement a, lui aussi, prestement convoqué un groupe de journalistes également présents sur les lieux pour dénoncer le même « complot » contre la gloire de celui qui est (re)devenu son idole. Mais il n’en a rien été, en fait. Les autorités aéroportuaires, alertées par leurs collègues de Bruxelles, savaient que le Falcon médicalisé ramenant le vieil opposant vers Kinshasa atterrirait avec une heure de retard, pour des raisons techniques, simplement. Les organisateurs du vol de Ya Tshitshi ayant sollicité l’autorisation de survol requise pour atterrir à Ndjili avec quelque retard. Interrogé par Le Maximum en début d’après-midi, mercredi 27 juillet, un cadre de l’Aviation civile rd congolaise a réagi à ces accusations de complot en déplorant le fait que « ceux qui prétendent instaurer un Etat de droit en RD Congo sont les premiers à se comporter comme dans un royaume. Le jet atterrira au plus tôt après 14 heures, selon l’ordre des demandes de survol, conformément aux usages en vigueur ».
INQUIETUDES SOULAGEES
A l’aéro Ndjili, les inquiétudes nées d’une heure de retard pris par le vol Bruxelles-Abidjan-Brazzaville-Kinshasa du Falcon emmenant Etienne Tshisekedi ont tôt fait de céder la place à un immense soulagement dès que l’aéronef a terminé sa course sur le tarmac juste en face des salons d’honneurs. Mais il a bien fallu attendre 40 bonnes minutes pour voir apparaître le patron de l’UDPS, qu’accompagnaient son épouse, Marthe Tshisekedi, quelques enfants et des conseillers triés sur le volet. Il fallait « préparer » le « Vieux » au bain de foule qui l’attendait et lui éviter les effets de la fatigue après le long vol qu’il venait de subir. Plutôt que de transiter par le salon d’honneur où une quarantaine de personnalités l’attendaient, l’octogénaire a directement embarqué à bord d’une jeep 4 x 4 préparée pour la circonstance et pris le boulevard Lumumba entouré par des véhicules de la police. Des précautions qui ont payé, parce que Etienne Tshisekedi, 83 ans, est en plus assez affaibli par la maladie. Il a quand même tenu le coup durant les 5 heures mis par le cortège pour atteindre sa résidence sur la 10ème rue Limete. Le ‘lider maximo’ de l’Udps a eu droit à un bain de foule impressionnant entre l’aéroport de Ndjili et l’entrée de Limete à partir du Pont Matete, émergeant de temps en temps par le toit ouvrant de sa jeep pour saluer la foule amassée le long du boulevard de son éternel signe de doigts levés en forme de la lettre V, symbole de victoire.
Si on ne peut pas tout à fait soutenir que l’opposition s’est rassemblée comme un seul homme pour réserver un accueil « délirant » au président du comité des sages de sa nouvelle plate-forme, le Rassemblement, force est de reconnaître que les militants, eux, ne se sont pas trop faits prier. A l’aéroport et le long du parcours emprunté par le cortège d’Etienne Tshisekedi, des drapeaux de la quasi-totalité des partis politiques de l’opposition proches du Rassemblement ont été aperçus.
DEBORDEMENTS MAITRISES
A ces partisans intéressés, il faut ajouter les curieux emportés le climat d’enthousiasme ambiant qui ont mis du leur dans la réussite de cet accueil. Mais pas seulement : ci et là, des débordements ont été maîtrisés de justesse par les services de maintien de l’ordre déployés par le Général Célestin Kanyama. En face de l’aéroport, il s’en est fallu de peu pour que la foule ne rompe le cordon de sécurité de la police et ne pénètre dans les installations aéroportuaires. A Masina, des Kuluna se faisant passer pour des combattants se sont laissés aller à quelques larcins avant d’être maîtrisés. Des témoins ont rapporté au Maximum qu’au moins 4 personnes ont été interpellées et un policier a été blessé par ces inciviques. Même si dans l’ensemble, le Général patron de la police de Kinshasa et ses hommes ont plutôt su tirer leur épingle du jeu : déploiement discret le long du parcours et aux alentours de la résidence du président de l’Udps ; pas d’armes à feu en vue, seulement des matraques ; dialogue permanent avec les combattants … l’affaire a réussi.
ATTENDU AU TOURNANT
C’est dimanche 31 juillet 2016 qu’Etienne Tshisekedi s’adressera aux combattants de l’opposition et à la population kinoise au cours d’un meeting sur le Boulevard Triomphal. Le patron de l’Udps, et manifestement, du Rassemblement des forces acquises au changement, est attendu au sujet du dialogue politique inclusif qui doit prendre des options politiques qui permettent un processus électoral apaisé. Dimanche 24 juillet, le Rassemblement avait pris la décision de récuser le médiateur du dialogue, le Togolais Edem Kodjo, à qui il reproche de n’avoir tenu compte des préalables qu’il avait posés. Mais depuis lors, de l’eau a coulé sous les ponts : la Conférence Episcopale Nationale du Congo a réagi à la position des nouveaux radicaux de l’opposition en soutenant que l’heure n’était plus à la multiplication des préalables qui pourraient être examinés au comité préparatoire des travaux ; mardi 26 juillet, Dlamini Zuma, la présidente de la commission de l’Union Africaine, a demandé à Etienne Tshisekedi de revoir sa décision de récusation du facilitateur désigné par l’UA, et qui avait toujours sa confiance. On attend donc de voir dans quelle mesure le président du comité des sages du Rassemblement persistera dans une posture de plus en perçue comme extrémiste et contre-productive.
D’autant plus que dans les rangs de l’opposition apparaissent de profondes divergences relatives à la participation au dialogue. Certains regroupements et partis politiques s’en ressentent dramatiquement, comme à la Dynamique pour l’Unité des actions de l’opposition. L’UNC de Vital Kamerhe et le MLC de Jean-Pierre Bemba (pour les travaux proprement dits), ainsi qu’un certain nombre de leurs alliés se montrent favorables au dialogue et ont transmis la liste de leurs représentants au comité préparatoire. Mais aussi le Front des Démocrates de Jean-Lucien Bussa, le MR de Clément Kanku, auxquels il faut ajouter l’abbé Nshole de le Cenco et le révérend pasteur Ekofo de l’ECC, Marie-Madeleine Kalala, Jonas Tshiombela, Jérôme Bonso, Maguy Kiala, Eliane Munkeni, Dirk Shaka et autres Alumba Lukamba pour le compte de la société civile.
Ce n’est qu’après le meeting de dimanche prochain que l’on saura si l’unité du Rassemblement résistera à l’épreuve du dialogue politique inclusif.
J.N.