Combien étaient-ils dans les rues kinoises ? L’heure est au bilan après la manifestation de l’opposition du 26 mai 2016, manifestement organisée pour la consommation extérieure. Ne serait-ce qu’en termes de participants, les écarts sont trop gros. Les organisateurs, par la seule voix un Fabrice Puela connu pour ses envolées oratoires généralement éloignées des réalités, annoncent 200.000 manifestants. La Police, elle, les estime à 2.000. L’Afp à 5.000. Pendant que Rfi choisit de n’avancer aucun chiffre en dehors du millier de personnes aperçues au lieu de rassemblement en face du Stade des Martyrs, et évoquée par Sonia Rolley dans son tout premier reportage (elle se contente d’évoquer ceux de l’opposition et de la Police non sans prendre l’avis d’Emmanuel Shadari, président du groupe parlementaire Pprd), un journal local – « Le Potentiel » pour ne pas le citer – relève que «Le cortège d’environ un millier d’individus au départ grossissait au fur et à mesure qu’il avançait sur le boulevard Triomphal». Un millier est quand même une foule contrôlable. Aucun esprit lucide ne peut comprendre un grossissement de dix, cinquante ou cent fois plus rien que sur le petit kilomètre séparant le siège du Mlc du croisement Triomphal-Huileries…
De deux choses l’une : soit les leaders se sont laissés déborder, soit ils ont favorisé et entretenu expressément le débordement. L’aveu est de l’Unc André-Claudel Lubaya. «Il s’agissait d’une déferlante populaire qui venait de différentes directions », déclare-il au quotidien «Le Potentiel» du 27 mai 2016, soutenant par la suite qu’«Il revenait à la police de les converger». Parlant ex professo, il est d’avis que «La police aurait pu, tout simplement, canaliser ceux qui venaient de tous les coins vers le point de chute. Elle a fait une dispersion inutile de la population. Nous déplorons les morts et les blessés et exigeons la libération de ceux qui sont appréhendés».
Combien de morts a-t-on enregistré à Kinshasa ? AUCUN !
Au sujet de confusion qui s’est produite autour de l’itinéraire convenu entre l’autorité urbaine et les organisateurs, le colonel Pierre Rombaut Mwanamputu, porte-parole de la Pnc, précise : «Les colonnes se sont scindées : une petite a respecté l’itinéraire, une grande colonne s’est entêtée. (…) Malgré ça, nous avions négocié qu’ils s’arrêtent face à la maison Schengen. Malheureusement, quand ils sont arrivés là-bas, ils ont forcé le dispositif de la police pour atteindre coûte que coûte l’Hôtel du gouvernement. Nous avons dit : pas question. Alors ils ont commencé à jeter des pierres et donc lorsque nous avons vu que nous étions caillassés, on s’est dit que nous n’étions plus en face de manifestants pacifiques, mais face à des émeutiers, donc on les a dispersés à coup de gaz lacrymogènes».
Ses propos du porte-parole de la Police sont corroborés par Emmanuel Akweti, le ministre provincial de l’Intérieur. «Les forces de l’ordre ont utilisé les gaz lacrymogènes pour disperser les marcheurs et si vous voulez connaître les raisons fondamentales, c’est le non-respect du tracé », dit-il, faisant constater que «…les forces de l’ordre se sont retrouvées devant deux tendances, deux catégories de marcheurs. La première catégorie est composée par des marcheurs qui n’ont pas respecté l’itinéraire tracé par l’autorité politico-administrative. Et la deuxième catégorie, ce sont les marcheurs qui ont essayé de respecter le tracé défini par l’autorité et, comme ceux qui ont été dispersés dans la première catégorie se sont joints à la deuxième catégorie, la police était obligée de devoir utiliser les moyens classiques pour pouvoir les disperser ».
Qui a décidé de la scission ?
A défaut d’un consensus…
Sous le titre «Marche du 26 mai 2016 : le gouverneur avait imposé Huileries, la foule contourne Kimbuta et se déverse sur 24 novembre», «Le Phare» rapporte dans son édition du 27 mai 2016 que «Une fois au croisement de l’avenue Huileries avec le boulevard Triomphal, une grande confusion s’est installée entre les organisateurs et la foule, qui ne faisait que grossir au fur et à mesure de l’arrivée de nouveaux participants à la marche. Pour les leaders de la Dynamique, il fallait respecter l’itinéraire imposé par l’Hôtel de Ville, c’est-à-dire s’engager sur Huileries pour s’arrêter au rond-point des avenues Huileries, Kabambare et Nyangwe. Pour la foule, il fallait rester sur le boulevard Triomphal, prendre 24 novembre et progresser jusqu’à la Maison Schengen. A défaut d’un consensus, deux colonnes se sont formées spontanément, l’une pour l’axe Triomphal-24 Novembre, et l’autre pour celui d’Huileries. La police, débordée, n’a pu empêcher la foule de violer la consigne du gouverneur Kimbuta, qui avait interdit le parcours Triomphal-24 novembre ».
Le reporter Eric Wemba note : «Les leaders de la Dynamique se sont scindés en deux groupes. Kamerhe et Fayulu ont résolu de conduire la colonne de l’axe Triomphal-24 novembre, tandis que Vuemba, Puela, Bazaiba et d’autres opposants se sont mêlés à celle de l’avenue Huileries. Jusqu’à ce niveau, aucun incident n’était à signaler».
La grande information est cependant livrée en ces termes «De part et d’autre, des jeunes de Lingwala, Kinshasa et d’ailleurs, pour la plupart des sans-emplois, voire des étudiants de l’Académie des Beaux-Arts, de l’IBTP et de l’ISC se sont joints aux manifestants, au fur et à mesure de leur progression. Alors que tout se passait normalement et tranquillement, les marcheurs de l’avenue Huileries ont rencontré une première barrière de la police au rond-point Huileries-Kabambare-Nyangwe. Mais profitant de sa supériorité numérique, la foule a forcé et dépassé cette barrière. Tandis que sur 24 novembre, les manifestants qui voulaient aller au-delà de la Maison Schengen ont été dispersés d’abord par des tirs de sommation en l’air puis des gaz lacrymogènes. En réponse à la répression, la foule a caillassé les forces de l’ordre. Mais cette action n’a pu faire bouger la ‘barrière policière’».
En clair : les organisateurs ont désorganisé la manifestation.
Pour la consommation extérieure
Dans la dernière chronique intitulée «26 mai 2016 : Marche pour obtenir plutôt des sanctions !», a été mise en évidence la coïncidence entre la fixation de cette date et la réunion du Conseil de l’Union européenne sur la situation politique et sécuritaire en RD Congo programmée pour le 24 mai dernier. Des organisateurs de cette manifestation, il est dit : «Ils s’attendaient à des sanctions visant les autorités gouvernementales. Ils ont passé la semaine à y préparer l’opinion».
La veille de la marche, ils croient avoir obtenu un soutien fort en apprenant que Ban ki-Moon «est profondément préoccupé par les informations relatives aux tensions politiques grandissantes, liées à l’incertitude qui persiste autour du processus électoral” et qu’il en appelle “au strict respect des libertés et droits fondamentaux consacrés par la Constitution et exhorte toutes les parties à faire preuve de retenue et à exprimer leurs opinions pacifiquement, y compris dans le cadre des manifestations prévues ce 26 mai“.
On peut déduire que les organisateurs voulaient absolument voir se produire des incidents ! «Le Potentiel» dont le propriétaire, Modeste Mutinga fait désormais partie du G7, l’a bien circonscrit en parlant de piège. Dans la même édition du 27 mai 2016, sous le titre «Marche du 26 mai : pari gagné pour l’opposition », le chapeau y fait allusion : « Hier jeudi 26 mai, la police a chargé et dispersé des manifestants dans les rues de Kinshasa et de la plupart des villes du pays. Ces heurts démontrent, une fois de plus, que la majorité au pouvoir est tombée dans le piège de l’opposition en recourant à violence pour disperser des foules qui marchaient pacifiquement. C’est donc un pari gagné pour les organisateurs qui ont poussé le pouvoir à la faute. Bilan : mort d’hommes à Goma et plusieurs blessés ailleurs».
Comment, du reste, s’en étonner lorsque Fabrice Puela, sous le mandat de qui la manifestation a été initiée et organisée, affirme « de plus », selon l’Afp dans sa dépêche du 27 mai 2016 intitulée «RDC: bilans contrastés après la journée de mobilisation de l’opposition», «que la police a tiré à balles réelles» ?
Depuis les années 1990, la tradition dans ce pays est de voir l’opposition radicale chercher à la communauté internationale le bras chaque fois qu’on lui tend la main.
Les rapports des diplomates occidentaux en poste ainsi que ceux du Bcnudh et des ONGDH genre Hwr sur les événements du 26 mai 2016 sont attendus avec impatience.
LE MAXIMUM AVEC Omer Nsongo die Lema