Samedi 23 avril 2016, vers 5 heures du matin, Jules Shungu Wembadio Pene Kikumba, Papa Wemba, faisait une apparition, la plus attendue des milliers de spectateurs et téléspectateurs du Femua, le Festival des Musiques Urbaines d’Amounabo, qu’organise chaque année le groupe Magic System. Papa Wemba et son groupe faisaient leur apparition sur la scène après les prestations du rappeur Kery James et de la chanteuse camerounaise Charlotte Dipanda. En guise d’introduction, l’artiste rd congolais annonce les couleurs : « je vous emmène dans un très beau pays de l’Afrique, le pays de la Rumba », lance-t-il sous les applaudissements du public. Sur la scène, il électrise aussitôt la salle avec une animation sur fond de musique et danses traditionnelles tetela. « Lomamba eyo », le 1er chant exécuté par Papa Wemba est tiré d’un répertoire de chansons funéraires tetela. Prémonition ? On ne saurait l’affirmer, il a toujours exécuté cette chanson entraînante. Un peu en retrait, Papa Wemba a le temps d’enchainer sur une deuxième chanson, puis une troisième, qu’il ne termine pas. Il s’écroule, victime d’un malaise et est transporté d’urgence à la clinique de l’Hôtel Dieu D’Abidjan, où rendra l’âme quelques heures plus tard.
Samedi dernier à Abidjan, la fête a donc tourné au drame. Le dernier show de Papa Wemba sur la terre des hommes était diffusé en direct sur la RTI (Radio Télévision Ivoirienne), c’est en direct que l’artiste s’écroule, stupéfiant les spectateurs venus nombreux vivre l’événement. La télévision ivoirienne elle-même met quelques minutes avant d’interrompre brutalement la retransmission en direct. Aux premières heures du matin, la nouvelle de la mort de Papa Wemba fait le tour du monde à partir d’Abidjan. Toutes les chaînes de radio et de télévision du monde répercutent l’information lorsqu’elles ne consacrent pas des journées entières à la vie et au parcours musical de l’artiste rd congolais mort sur la scène. On le sait aujourd’hui, c’est ainsi que l’artiste rêvait de finir sa carrière : en apothéose, devant des milliers de spectateurs et téléspectateurs.
Depuis samedi 23 avril, Papa Wemba a effectivement fait tourner les regards du monde vers le pays de la Rumba, sa République Démocratique du Congo. C’est le dernier cadeau de l’artiste dont le décès a éclipsé toute l’actualité politique : le héros national s’en est allé, en héros. Oui, « Héros National » ? C’est le dernier surnom que Papa Wemba s’est donné. Il est passé inaperçu parce que l’artiste se l’affuble dans une chanson en langue tetela, la langue sa tribu. « Wembadio Pene Kikumba héros national », chante Wemba dans « Keema Fumbe », sa dernière oeuvre en langue maternelle. L’homme a réussi, post mortem, à mettre l’univers en branle.
En République Démocratique du Congo, le Président de la République, Joseph Kabila, a instruit le gouvernement d’organiser des obsèques dignes du rang de l’artiste décédé. Un comité de préparation comprenant le ministre de la culture, Banza Mukalay, gouverneur de la ville de Kinshasa, André Kimbuta, et des artistes musiciens a été mis sur pied. Mais dès lundi 25 avril dans la matinée, le gouverneur de la province du Sankuru, Berthold Ulungu, Mme Shungu Wembadio, mieux connu sous l’appellation de Luzolo Amazone, et une délégation de la famille restreinte de l’artiste décédé samedi dernier se sont rendus à Abidjan, en attendant le rapatriement de la dépouille à Kinshasa. Des informations reçues lundi tard dans la soirée indiquent que la dépouille mortelle de Papa Wemba arrive à Kinshasa jeudi 28 avril 2016 en provenance d’Abidjan, accompagnée par une forte délégation d’officiels Ivoiriens.
J.N.