Le président du Mouvement pour le Renouveau, le député opposition Clément Kanku Bukasa, a accordé au Maximum une importante interview axée sur les questions politiques de l’heure ainsi que sur la vie dans son parti politique. Le lecteur trouvera ci-après l’intégralité de cet échange. Interview.
Le Maximum (LMXl) : Comment se porte votre parti politique, le Mouvement pour le Renouveau (MR) aujourd’hui, à quelques mois en principe des échéances électorales, parce qu’on a l’impression que vous êtes davantage à Kinshasa que dans votre fief électoral qu’est Dibaya, comment expliquez-vous cela ?
Clément Kanku (CK) : Je dirais que ça va. Je peux vous rassurer que j’étais, il n’y a pas longtemps, dans mon fief de Dibaya. Et comme vous le savez, nous sommes un parti politique national avec des visées, je dirais, sur le plan national. Ce qui fait qu’en ce moment, nous sommes entrain de travailler sur certaines activités du parti dont les consultations populaires lancées il y a à peu près 1 mois à travers toute la République. Nous sommes pour le moment entrain de récolter les informations venant de différentes fédérations, et la ville de Kinshasa va clôturer dans quelques jours. A travers ces consultations, nous avion été saisis par la population sur des cas qui touchent à sa vie, parmi lesquels, l’électricité. Donc la campagne de sensibilisation « pelisa mwinda » est entrain de porter ses fruits même si c’est timide, qu’à cela ne tienne, en terme de changement et en terme de prise en compte de ses revendications et en terme de redevabilité aujourd’hui, la Snel s’est engagée dans une campagne d’explication à travers des journées portes ouvertes au regard du déficit énergétique, ce qu’on ne voyait pas avant.
Aisément, je dirais en ce qui concerne le MR, que nous travaillons pour une véritable assise nationale parce que nous considérons que le Mouvement pour le Renouveau doit être un parti politique qui a pignon sur rue sur l’ensemble du territoire national, afin de faire connaitre son projet de société, pourquoi pas conquérir le pouvoir comme nous l’entendons.
LMX : Vous avez quelles ambitions pour la prochaine mandature, pour les prochains cinq ans ?
C. K : Nous pensons que le parti va se déterminer sur cette question en termes de responsabilité à conquérir, mais une chose est claire, tout leader politique doit baser sa politique sur un mandat législatif qui lui permettra d’être en contact avec sa base. C’est une grâce que j’en sois à mon deuxième mandat à l’Assemblée nationale, avec le travail que je réalise sur le terrain, malgré que je n’aime pas parler des activités et œuvres que je pose. Mais j’ose croire que les prestations qu’on a réalisé au niveau de l’Assemblée nationale, au niveau de certaines activités en dehors du Parlement ainsi que d’autres actions concrètes sur le plan social, peuvent permettre de dire que nous devons avoir des ambitions sur le plan électif avec nos bases, pour avoir un mandat électif d’un député.
LMX : Parlons maintenant du dialogue politique, lequel tarde d’ailleurs, le processus électoral semble lui-même menacé, quelle est votre position compte tenu de la dernière recommandation du secrétaire général de l’Onu, Ban Ki Moon qui semble un peu être contradictoire lorsqu’il parle du respect de la Constitution et appelle au dialogue. Quelle est votre position sur ce sujet ?
C.K. : D’abord, nous croyons que parler du dialogue en respectant la Constitution n’est pas impossible. L’un n’exclut pas l’autre donc. Si le secrétaire général Ban Ki Moon dit que la Constitution doit être respectée et pousse à la fois au dialogue pour dégager un consensus sur la marche à suivre, je pense que c’est tout à fait cohérent par rapport à la démarche et cela n’est pas contradictoire de sa part. Il y a quelques années, le MR avait sollicité un dialogue inclusif. Aux concertations politiques d’autrefois, nous y avions participé aux travaux préparatoires sous condition d’inclusivité. Et ces concertations n’avaient pas conjugué d’efforts pour que tout le monde se sente concerné, et aujourd’hui, l’histoire nous rattrape pour n’avoir pas été écouté, et on revient à la case du départ. Exceptés ceux qui sont entrés dans le gouvernement, ayant vu leur condition de vie changer, mais nombreux disent qu’il s’agissait d’un gouffre financier qui n’aura pas servi à la population. Cependant, nous continuons à croire que le mode le mieux indiqué pour arriver à trouver une solution à la crise qu’on traverse, reste le mode pacifique qui est justement le dialogue. Le dialogue tel que proposé par Monsieur Kabila ne rencontre pas l’esprit de celui que nous avons toujours souhaité ou prôné, inclusif bien entendu. Sur cette question il faut retenir qu’il y a des barrières qui empêchent qu’il soit vraiment inclusif. Premièrement, c’est son contenu. Une frange de l’opposition, parfois de la Majorité présidentielle, pense que ce dialogue est une procédure pour arriver à prolonger le mandat du Président Kabila. Cette impression empêche ceux qui refusent le dialogue d’adhérer à l’idée. C’est pourquoi nous lançons un appel au Président Kabila qu’on croit être celui qui détient la clef de l’inclusivité du dialogue, de rassurer les uns et les autres. Pour cela, il peut rassurer s’il se définit clairement sur cette question qui constitue une pierre d’achoppement, le 3ème mandat du Président de la République ou la prolongation de celui-ci. Ceci parce que d’aucuns considèrent que le Chef de l’Etat veut se maintenir au pouvoir. Nous avions pris le courage de lui demander au Palais de la Nation, de briser le cycle infernal de changement du pouvoir par la violence, et de donner une véritable impulsion de la démocratie dans le pays par la passation de pouvoir dans les délais constitutionnels. Comme il détient la clef de l’inclusivité du dialogue, il peut calmer les esprits en précisant qu’il n’a nullement besoin de se maintenir au pouvoir par la force. Cette position va dissiper le malentendu qu’il y a aujourd’hui, lequel est alimenté par ses courtisans qui ne se gênent plus, demandant qu’il y ait une transition avec le Président Joseph Kabila à la tête du pays. Ceci donne l’impression de refuser les élections pour profiter d’une transition qui va tout simplement prolonger le mandat de fait de Kabila, autrement dit le glissement.
En ce qui concerne le facilitateur, nous pensons que le dialogue ne peut être efficace que s’il bénéfice de l’accompagnement de la communauté internationale. Si on se met ensemble avec un témoin étranger, je pense que les résolutions qu’on prendrait ensemble pourraient être exécutées parce qu’on aura eu la présence d’une personne neutre. Autre élément pour détendre l’atmosphère politique, la libération de certains prisonniers politiques. Et pour cette question, nous avions fait la proposition au Président Kabila au Palais de la nation, lui proposant un juriste chevronné dans sa cour pour le suivi. Dans le cadre d’apaiser les esprits pour l’inclusivité, nous lui avions demandé encore l’ouverture des médias fermés, en dépit de la chaine de télévision catholique Rtce, ouverte parce le Cardinal Monsegwo s’était personnellement impliqué. Il faudrait qu’il y ait accès de l’opposition dans les médias publics, car il se constate que ces médias favorisent toujours la Majorité présidentielle. En bref, si tous ces points étaient pris en compte, ce dialogue aurait pu se tenir et sortir le pays de l’impasse. Aujourd’hui, on se pose la question sur l’opportunité de celui-ci, qui risque de prendre des résolutions qui ne seront pas applicables dans les délais constitutionnels que tous souhaitent voir respectés. Il ya 9 mois, on avait posé cette question, et en son temps, certains de l’opposition qui demandaient ce dialogue, ont même crée des plateformes pour cela. S’ils n’avaient pas fait volte face, et qu’ils ne s’étaient pas radicalisés, et qu’on s’était mis tous d’accord sur un cahier de charges très clair, et c’est cela l’erreur de l’opposition, et que le Président Kabila aussi l’avait fait tel que décrie précédemment, on serait à l’aise au jour d’aujourd’hui, et toutes ces questions qu’on regrette maintenant sur le fichier électoral, l’enrôlement des nouveaux majeurs se seraient réalisées dans les délais. Commencer à le faire aujourd’hui, risque de nous entrainer dans les contraintes techniques à l’appréciation de chacun. Il y a des organismes tel que l’OIF qui, à l’issue de son audit sur le fichier électoral, dit que cette opération est faisable en 3 à 4 mois, alors que la Ceni parle de 16 mois. La plus grande responsabilité de la non-tenue du dialogue revient avant tout au Chef de l’Etat. Mais à l’opposition aussi, certains ont pour seul objectif de bloquer systématiquement une démarche qui aurait abouti à une issue heureuse, pacifique. Donc la responsabilité est partagée entre le Chef de l’Etat et certains radicaux de l’opposition dans une certaine mesure.
Toutefois, le Président Kabila a le temps de trouver des solutions rapidement. Le pays ne va pas sombrer dans le chaos à cause de la mauvaise foi des uns et des autres. Nous osons croire qu’on va privilégier l’intérêt général, à savoir, comment faire pour organiser de bonnes élections dans un délai qui respecte la Constitution, en favorisant un climat de paix et surtout en permettant au peuple de faire le choix de ses dirigeants.
LMX : Vu la situation actuelle, quelle sera la priorité de la session parlementaire de mars qui s’ouvre dans quelques semaines ?
C.K. : Je crois elle sera une session hautement politique, parce que tout le monde sera focalisé sur les élections. Elle sera l’avant dernière session à mon avis, et sera celle qui va permettre de terminer certaines lois qui empêchent de poursuivre le processus électoral dans les règles. Il y a des lois en souffrance, lorsque la Ceni avait annoncé sa feuille de route avec ses contraintes, lesquelles (lois) étaient d’ordre législatif, de la responsabilité du Parlement. L’Assemblée Nationale devra prioriser les textes des lois qui vont favoriser l’organisation des scrutins dans les meilleurs conditions. Au-delà de cela, je pense que le contrôle parlementaire reste une voix par excellence pour relayer les attentes de la population. Plus on s’approche de la fin du mandat, plus les députés vont vouloir se rendre visibles à leurs bases. Il y aura engouement pour le contrôle parlementaire. Bref, la session de mars sera très mouvementée.
LMX : Vous venez d’organiser une campagne de sensibilisation à Kinshasa, êtes-vous satisfait et que comptez-vous faire par la suite ?
C.K. : Etre satisfait, je dirais en partie. Parce que la population a répondu positivement à cette sensibilisation. Le but était de faire attendre sa voix de détresse, de désarroi par rapport une situation qui a trop duré. Je me suis beaucoup investi au Parlement pour trouver solution à cette question d’énergie électrique en convoquant successivement l’ancien Adg Yengo, paix en son âme, les ministres de l’Energie et du Portefeuille, encore une fois de plus, l’Adg de la Snel. Le pays traverse une crise majeure sans un engagement sérieux du gouvernement. Le premier ministre organise des Troïka à chaque fois qu’il ya des soucis économiques et financiers, sans penser à la question d’énergie électrique. La population a adhéré à notre vision, ce qui a poussé la Snel à organiser des portes ouvertes dans les quartiers huppés en lieu et places des quartiers où habite le peuple victime des coupures intempestives de l’électricité. C’est une distraction parce que la population attend des solutions et non des explications, elle est familière des notions d’électricité comme le délestage, le feder etc. La Snel a promis de rétablir la situation d’ici le 17 mars prochain, c’est une bonne chose. Parce que l’article 48 de la Constitution garantit l’accès à l’eau potable et à l’électricité. La responsabilité est aussi partagée entre le gouvernement et la Snel, parce que si l’Exécutif avait débloqué 400 millions de dollars, bien de choses auraient pu être arrangées, parce qu’il a dépensé pour le parc agro industriel de Bukangalonzo, l’immeuble intelligent…
Propos recueillis par E.M. et D.O.