Sur le processus électoral rd congolais, les louvoiements font de plus en plus place au langage de la vérité. Des élections, présidentielle et législatives en 2016, ou encore tous les autres scrutins (élections locales, municipales, provinciales, etc.), ne sont quasiment pas réalisables dans les délais constitutionnels. Le porte-parole de la majorité présidentielle (MP), Alain Atundu Liongo, l’a déclaré en termes assez clairs au début de la semaine. Mais si dans l’opinion publique en RD Congo, peu accorde foi aux informations fournies par ceux que l’on tient à voir quitter le pouvoir. Le porte-voix du camp présidentiel se fondait pourtant sur un rapport d’audit confectionné par les soins de l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF), rendu public le même jour. Les résultats des travaux effectués par l’OIF, qui a pris le soin d’associer à ses investigations aussi bien la MP, l’opposition parlementaire, que l’opposition non parlementaire (UDPS Tshisekedi et cie, donc) ont été clairs sur la question, eux aussi. Même si les termes utilisés dans cette œuvre d’une certaine facture intellectuelle sont forts doux : le fichier électoral rd congolais doit être amélioré ; il renferme des doublons en quantité impressionnante ; n’a jamais été expurgé des morts depuis 2006 ou 2011 ; de même qu’il exclut la tranche des citoyens de ce pays qui ont atteint l’âge d’élire depuis 2011.
En réalité, des sources du Maximum à la centrale électorale assurent, depuis près d’un an maintenant, que le fichier électoral hérité des scrutins de 2011 est à jeter à la poubelle. Le fiabiliser requiert de tout recommencer, mais les acteurs politiques, tous amplement au courant de la situation, occultent le vrai problème pour des raisons de positionnement. « Tout le monde sait qu’on court droit vers un cul de sac », assure au Maximum un expert qui a requis l’anonymat.
Lundi 16 novembre dernier, la Commission Africaine pour la Supervision des Elections (CASE) a rendue publique une déclaration (n° 4515) qui confirme les appréhensions de la source du Maximum à la CENI. Les recommandations de la Case aux partis politiques en attestent. Il leur est demandé, noir sur blanc : de « stopper toute campagne de désinformation autour du processus électoral et d’apprendre désormais à dire la vérité et rien que la vérité au peuple » ; de « s’aligner tous ensemble derrière l’idée du dialogue afin de décider de concert sur l’avenir de la RDC et la marche du processus électoral ».
A la société civile, la Case recommande, carrément d’ »éclairer le peuple congolais sur la nécessité de refondre le fichier électoral congolais en procédant immédiatement à un nouvel enrôlement des électeurs avec comme avantages : l’établissement d’un fichier électoral propre et crédible n’alignant pas les personnes décédées ; la levée de l’équation des personnes en uniforme car ceux-ci ne pouvant pas du tout se faire enrôler conformément à la loi ; la lutte efficace contre les doublons sur la liste des électeurs ; la production d’une nouvelle carte d’électeur pour tous les Congolais et ; la mise en place d’un fichier électoral répondant aux standards internationaux en la matière.
Avant d’en arriver à ces recommandations, le communiqué de la Case prend soin de confirmer que toutes les forces vives de la RD Congo ont été associées à la confection du rapport d’audit de l’OIF. En plus des partis politiques de la majorité et de l’opposition parlementaire et extraparlementaire, les confessions religieuses représentées par la Conférence Nationale Episcopale du Congo (CENCO), la Mission d’observation des Nations-Unies (MONUSCO) et le monde scientifique rd congolais (Réseau d’Etudes Electorales), la société civile (EDUCIEL), ont tous été associés aux travaux d’audit.
Le choix à opérer, pour la réussite du processus électoral en cours en RD Congo, se situe donc entre l’organisation et la tenue de scrutins crédibles et la tenue, coûte que coûte, d’élections conformément aux délais constitutionnels. La question, qu’on évite de poser et de se poser, consiste donc aussi à savoir si la démocratie doit être synonyme de la qualité de l’élection ou du respect des délais de mandats présidentiels. Sur ce nerf de la guerre s’opposent majorité au pouvoir et opposition avide de pouvoir.
J.N.