Le conclave de la Dynamique de l’opposition s’est clôturé le week-end dernier, sans grande surprise, avec une déclaration contre la tenue du dialogue politique et un appel à la mobilisation en vue de manifestations d’envergure. Le groupe animé par l’UNC de Vital Kamerhe, le MLC de Jean-Pierre Bemba et quelques partis politiques et organisations de la société civile sans grande envergure a néanmoins reçu le soutien du G7 dont les principaux leaders ont effectué le déplacement de la paroisse Notre Dame de Fatima à la Gombe, où se tenaient ces assises auxquelles l’UDPS/Tshisekedi n’a pas pris part. La fille aînée de l’opposition, ainsi qu’on désigne le parti politique du vieil opposant rd congolais, s’étant carrément dissociée du regroupement en se déclarant favorable au dialogue politique.
Notre Dame de Fatima a ainsi révélé que la Dynamique apprenait à faire seule, sans les combattants que l’on sait autrement plus nombreux, de l’UDPS.
Appel à manifester
L’appel à manifestations publiques lancé par l’Ecidé Martin Fayulu, un acteur politique qui trône au sommet d’un parti politique qui compte 2 députés nationaux, dont lui-même, fut donc révélateur de cet état d’esprit. Le porte-parole de la dynamique a dû invoquer la quasi-totalité des morts célèbres enregistrées ces 15 dernières années en RD Congo pour attirer l’attention de l’opinion.
Où est Floribert Chebeya ? Où est Fidèle Bazana ? Où est Armand Tungulu ? Que sont devenus Franck Ngycke et son épouse ? a invoqué Martin Fayulu, ajoutant sur sa liste les Généraux Fardc Mamadou Ndala et Lucien Bahuma. Même si le lien entre les décès de ces différentes personnes reste raisonnablement difficile à établir. D’abord, parce que le rapport entre les décès des quatre premiers et ceux des deux généraux dont l’un est mort quasiment au front est quasi impossible.
Franck Ngyke, Mamadou Ndala
Colonel au moment du drame, Mamadou Ndala est décédé le 4 janvier 2014, quelques jours avant le lancement des opérations contre les ADF dans la région de Beni. La jeep de commandement qui emmenait Mamadou Ndala vers Mavivi, localité située à quelques km de Beni-Ville, avait été atteinte par un tir de roquette. Mortellement touché, le héros de la guerre contre les rebelles du M23 vaincus moins de deux mois plus tôt est décédé sur le champ. Au terme du procès des principaux suspects instruit par la justice militaire, il s’est avéré que ce sont les ADF qui ont commandité l’assassinat de Mamadou Ndala, en complicité avec quelques officiers Fardc dûment condamnés. Rendre des adversaires politiques responsables (la majorité présidentielle au pouvoir en l’occurrence) de la mort de Mamadou Ndala sans apporter d’éléments nouveaux sur les circonstances du drame est à la fois gratuit et facile. Mais la préoccupation de la Dynamique de l’opposition n’est sans doute pas la manifestation de la vérité.
Mémoires souillées
Il en est de même du décès, samedi 30 août 2014 en Afrique du Sud, du Général Lucien Bahuma, un autre héros de la guerre contre le M23, qui venait de s’illustrer dans le démantèlement des rebelles ougandais de l’ADF. Surpris par une crise cardio-vasculaire, Lucien Bahuma avait été instamment acheminé en Afrique du Sud à la requête du Président de la République en personne. Le ranger sur la liste des meurtres à mettre sur le dos d’adversaires politiques aux affaires à Kinshasa peut paraître ridicule dans la mesure où un AVC ne se commandite pas tout de même.
Ces deux cas malheureux invoqués à l’appui de l’appel à manifester de Martin Fayulu suffisent pour éclairer les motivations qui sous-tendent autant d’amalgames. Parce que sur les raisons qui ont milité en faveur du double assassinat crapuleux de notre confrère Franck Ngycke et de son innocente épouse, le 3 novembre 2005, nul ne peut soutenir que ses bourreaux font partie de ce qu’est la majorité au pouvoir aujourd’hui plutôt que de l’opposition. Encore qu’il faille savoir qui faisait partie de quel camp à l’époque des faits, l’orateur de samedi dernier, ainsi que nombre de ses collègues dans la nouvelle dynamique, ayant fait partie de l’Alliance de la Majorité Présidentielle durant la campagne électorale 2006.
Les soupçons entretenus sur les décès de Floribert Chebeya et Armand Tungulu paraissent, eux aussi, beaucoup trop faibles pour faire raisonnablement pencher la balance contre la majorité au pouvoir, que les opposants pointent du doigt un peu trop facilement. Surtout lorsqu’on se demande à qui profitent ces crimes. Mêler les mémoires d’illustres défunts à toutes les sauces politiques équivaut, au finish, à souiller ces mémoires.
J.N.