Débat fort houleux sur le budget 2015 à l’Assemblée nationale, même les élus de la majorité n’ont guère été tendres vis-à-vis du Premier ministre, Matata Ponyo. Mais le ministre des Finances, Henri Yav Mulang, avait déjà fait l’essentiel, quelques jours plus tôt, en rassurant les élus au départ plutôt dubitatifs sur les efforts du gouvernement de poursuivre la mise en œuvre des réformes nécessaires à l’application intégrale de la Loi sur les finances publiques, LOFIP.
Certes, beaucoup reste à faire, a reconnu le ministre des Finances d’un ton réfléchi. Toutefois le gouvernement, a rappelé avec brio, Yav Mulang, à la Chambre basse, a opéré des avancées significatives. Il s’agit notamment de la présentation régulière, depuis 2011, au Parlement, de la Loi portant reddition des comptes de l’exercice clos, ce, avant la Loi des finances, des efforts déployés, tant pour présenter le projet de loi de reddition des comptes dans les mêmes formes que la Loi des finances correspondante que pour conformer les documents annexés au projet de Loi de reddition des comptes aux prescrits des articles 81 et 82 ou encore de l’accroissement, si faible soit-il, depuis 2011, du nombre des comptables publics transmettant leurs comptes de l’exercice.
Les autres réalisations mises en exergue par le ministre des Finances sont l’assainissement progressif des budgets annexes et des comptes spéciaux pour arriver à ne retenir, d’ici trois ans, que ceux répondant à la définition et aux critères de la LOFIP, l’affectation, conformément à l’article 218 de la LOFIP, des recettes au profit des provinces au fur et à mesure du transfert effectif des compétences et des responsabilités en matière des dépenses ainsi que la présentation chaque année, selon les prescrits des articles 223 et 224 de la LOFIP, du projet de loi de consolidation du budget du pouvoir central et ceux des provinces, étant entendu que la reddition des comptes du budget des provinces et des entités territoriales décentralisées, s’effectue selon l’article 180 par un édit.
Il sied de rappeler que Yav Mulang réagissait aux préoccupations exprimées par les députés le 19 octobre 2015 lors du débat général sur le projet de loi portant reddition des comptes de l’exercice 2014. Il s’est agi d’une part, des questions d’ordre structurel, portant essentiellement sur l’application de la Loi n°11/011 du 13 juillet 2011 relative aux finances publiques, en général, et sur le respect des dispositions de cette Loi concernant l’exécution de la Loi des finances d’un exercice budgétaire, et donc la reddition des comptes y afférents en particulier., et d’autre part, des préoccupations spécifiques relatives à l’exécution proprement dite, en recettes comme en dépenses, du Budget de l’Etat pour l’exercice 2014.
Le ministre des Finances a indiqué que plusieurs mesures, considérées comme préalables majeurs à la mise en œuvre des innovations introduites par la LOFIP, ont déjà été prises. Ainsi, en termes de modernisation du cadre juridique, on peut citer la signature de plusieurs textes règlementaires, tels le décret n°13/050 du 06 novembre 2013 portant règlement général sur la comptabilité publique, le décret n°13/051 du 08 novembre 2013 portant plan comptable de l’Etat et le décret n°13/054 du 11 novembre 2013 portant Règlement d’Administration applicable aux comptables publics.
D’autres textes importants sont en voie de signature, principalement, des textes portant sur le dispositif technique du plan comptable de l’Etat, à savoir le Cadre conceptuel du plan comptable de l’Etat, la Nomenclature des comptes, le Manuel des fiches des comptes, le Manuel de comptabilisation des recettes publiques et des dépenses publiques. Ou encore des textes portant réforme du cadre structurel de la tenue de la comptabilité publique, en l’occurrence le projet de décret portant création, organisation et fonctionnement d’une Direction Générale du Trésor et de la Comptabilité Publique et le Projet de décret portant création, organisation et fonctionnement du réseau national des comptables publics.
Yav Mulang a particulièrement mis en exergue «des textes portant sur la transparence et la participation citoyenne à l’élaboration du Budget». Puisque la mise en œuvre satisfaisante de la LOFIP requiert la consolidation des fondamentaux du système actuel de gestion des finances publiques, le gouvernement s’est employé au renforcement non seulement de la chaine de la dépense par l’acquisition d’un nouveau logiciel mais aussi des fonctions budgétaires et financières des ministères sectoriels à travers la création en leur sein des directions administrative et financière et tout naturellement de la stabilisation du cadre macro-économique et budgétaire.
Abordant la question soulevée autant par la Cour des Comptes que des députés, celle liée aux insuffisances maintes fois constatées dans la tenue des comptabilités par de nombreux comptables publics et qui sont à la base de l’absence, à l’occasion de la reddition des comptes, de déclaration de conformité par la Cour des Comptes, Yav Mulang a tenu, avant tout, à signaler que le processus de bancarisation de la paie des agents et fonctionnaires de l’Etat, prive aujourd’hui les comptables publics de la saisie des données relatives à cette opération, car il se déroule encore sans la présence des comptables publics auprès des banques payeuses. Et de poursuivre, «Pour ce qui est du dépôt tardif ou de non dépôt des comptabilités à la Cour des Comptes par certains bureaux comptables, plusieurs mesures sont déjà prises pour y remédier dont notamment la signature, depuis le 14 février de cette année, de l’Arrêté portant dispositions pratiques de comptabilisation de la paie des agents et fonctionnaires de l’Etat et de l’IPR y afférents exécutée par les banques».
Le ministre des Finances a, pour ce faire, instruit l’administration des Finances de sanctionner les 295 comptables publics n’ayant pas transmis les comptabilités à la Cour des Comptes. «En définitive, tranche Yav Mulang, tout sera fait pour arriver à mettre en vigueur l’intégralité des dispositions de la Loi sur les finances publiques à l’échéance de janvier 2019». Abordant la problématique de la TVA, de la parafiscalité pétrolière, de l’existence des plus-values et des moins-values, plus ou moins importantes par nature d’impôts, droits et taxes ou encore des recettes non budgétisées, le ministre des Finances s’est voulu plus pragmatique. «Pour inverser cette tendance, dit Mulang, le gouvernement a mis en place, depuis 2001, un vaste programme de réforme fiscale et douanière et de modernisation des administrations fiscales».
«L’élaboration d’un nouveau code des douanes, l’instauration de la taxe sur la valeur ajoutée, TVA, l’élaboration d’une nouvelle nomenclature de taxes non fiscales ainsi que l’encadrement des recettes par l’intermédiation bancaire rentrent dans le cadre de ce programme de mobilisation des recettes entrepris par le gouvernement», a poursuivi le ministre des Finances. La consolidation de la réforme de la TVA s’effectue par la mise en place d’un système informatique de la remontée de l’information sur la TVA collectée.
L’instauration de la chaine de recette, a fait comprendre le ministre des Finances, a été conçue comme le circuit d’exécution de quatre étapes de réalisation des recettes publiques, à savoir la constatation, la liquidation, l’ordonnancement et le recouvrement, passent par la mise place, avec l’appui des partenaires financiers et techniques, d’un système intégré de l’ensemble des administrations financières. «Ce processus est déjà lancé au niveau de la Direction Générale des Douanes et Accises, DGDA, et de la Direction Générale des Impôts, DGI, avec le passage de sydonia ++ à sydonia world, permettant ainsi l’intégration informatique des étapes de la phase administrative du circuit de la recette publique…Quant à la DGRAD, le processus d’informatisation est en phase d’installation», a relevé le ministre des Finances.
Quant au Guichet Unique Intégral du Commerce Extérieur, il aura l’avantage, note Yav Mulang, de mieux canaliser les recettes du Trésor provenant des opérations de pré-dédouanement, de dédouanement et de post dédouanement. Le gouvernement entend accroître les recettes découlant des ressources naturelles (mines, hydrocarbures et forêt) et de nouvelles technologies de l’information. Le ministre des Finances a notamment fait le point mis quant aux décaissements effectués en 2014 au profit de la CENI : «Ils se sont élevés à 58 milliards 462 millions 676 mille 532,6 francs congolais contre une prévision de 254 milliards 649 millions 561 mille 176 francs congolais», a précisé Yav Mulang.
Et concernant une partie des salaires de 2013 qui serait payée en 2014 et qui aurait alourdi le déficit à fin 2014, le portant à 95 milliards de CDF, le ministre des Finances a indiqué que «dans le cadre du système du budget de gestion, une dépense non exécutée à la fin d’un exercice budgétaire, peut bénéficier d’un avis d’imputation directe lui permettant de se rattacher au budget de l’exercice en cours. C’est ce qui s’est passé, ce principe ayant été appliqué vu le caractère contraignant des rémunérations».
S’agissant des dépassements de certaines dépenses et du déficit dans l’exécution du Budget 2014, a renchéri Yav Mulang, deux éléments qui ont focalisé, à juste titre, l’attention de la plupart des Honorables Députés Nationaux, il y a lieu de noter que des impératifs d’ordre sécuritaire, notamment la traque des forces négatives à l’Est du pays, et de rétablissement de l’autorité de l’Etat, ont amené le Gouvernement à exécuter certaines dépenses au-delà des crédits votés. Pour ce qui est de la récurrente question de la dette publique, le gouvernement a conscience, dit Yav Mulang, qu’il faut payer la dette intérieure, non seulement pour désintéresser les créanciers nationaux qui ont fait confiance au Gouvernement et soulager ainsi leur trésorerie bloquée dans le financement des biens et services fournis, mais aussi pour permettre aux entreprises créancières de sauvegarder des emplois et maintenir la paix sociale.
Et Henri Yav Mulang de conclure qu’ à trois ans de l’échéance de l’application de l’intégralité des dispositions de la Loi relative aux finances publiques, le Gouvernement, en général, et le ministère ayant les finances dans ses attributions, en particulier, restent mobilisés à franchir toutes les étapes amenant à la mise en vigueur intégrale de la Loi sur les finances publiques, LOFIP.
POLD LEVI & DIDIER OKENDE WETSHI