Samedi 15 mars 2014 décédait à Kinshasa un certain Clément Kabasele Mwamba. L’homme n’était pas un inconnu, loin de là. Kabasele Mwamba, c’était ce monsieur qui, sous et malgré la conjoncture économique plutôt difficile sous la dictature du Maréchal Mobutu, avait réussi à inventer et à commercialiser une liqueur bien connue des amateurs, le wisky dénommé « Pousse-Café », portant ainsi très haut la marque « Zaïre » sur l’échiquier mondial des affaires. Clément Kabasele était aussi l’inventeur d’une dizaine de produits fins dans le domaine de la « fruithérapie », le traitement sanitaire à base de fruit. En plus d’un bon nombre de parfums aux saveurs originales. Sous d’autres cieux, ce natif de Tshibambula (Demba) dans l’ex. province du Kasai Occidental aurait mérité mieux que la débrouille hardie à laquelle il fut contraint pendant la période de la dictature.
Le décès du PDG propriétaire de la société « Interfruit » fut rangée dans les colonnes des faits divers, un peu trop vite. Il a fallu attendre quelques bonnes années pour s’imprégner des conditions du décès à 77 ans de cet homme hors du commun. En réalité, Kabasele Mwamba n’avait jamais renoncé à ses ambitions inventives. Confronté aux problèmes de financement de ses nombreuses inventions, l’homme avait entrepris de quérir des soutiens à travers le monde pour lancer ses produits. Le 11 juillet 2013, presque un an avant son décès tragique, Clément Kabasele recevait dans sa résidence de Kinshasa Barumbu un groupe d’hommes d’affaires américains. Christopher Barron et Nsaka Kaninda, promoteurs des business au pays de l’Oncle Sam étaient intéressés par les ressources minières de la RD Congo. Et Clément Kabasele Mwamba possédait, à 80 km à peine de la ville de Lubumbashi dans l’ex. Katanga, une carrière minière.
Le décès en 2014 de l’inventeur rd congolais est consécutif au sort réservé à sa mine, la mine de Mbola. L’information, livrée il y a plusieurs mois par un homme de droit de Lubumbashi, avait d’abord parue invraisemblable. Avec le recul du temps, elle l’est moins. Mbola a été carrément ravi à Clément Kabasele Mwamba qui y avait investi tous ses avoirs. L’inventeur n’a pas survécu au choc subi avec ce coup du sort orchestré par … l’ex. gouverneur de l’ex. province du Katanga, Moïse Katumbi, selon les révélations de Jean-Claude Muyambo, l’ancien bâtonnier du barreau de Lubumbashi aujourd’hui en détention à Makala. Dans « Ma part de vérité », une série de lettres ouvertes qui avaient défrayé la chronique à Kinshasa et partout en RD Congo, ainsi que dans une intervention mémorable aux concertations politiques de Kinshasa, cet ancien ami de l’ex. gouverneur accusait avec force détails.
Jean-Claude Muyambo révèle que Clément Kabasele détenait des droits de propriété sur la mine de Mbola, acquis sous le ministre des mines Ingele Ifoto. Mais aussi, que la mine recelait des minerais d’une très haute teneur. Les bonnes nouvelles s’arrêtent là. Au-delà, les mauvaises surviennent : Moïse Katumbi apprend que dans la mine qui appartenant à un non originaire sont enfouis des produits d’une teneur élevée et sa lance à leur conquête, avec l’appui des creuseurs artisanaux et d’un groupe d’extrémistes du TP Mazembe, les « Cent % ».
Tout avait commencé le 6 juin 2006, lorsque Moïse Katumbi et quelques membres de Cent % Mazembe effectuent une descente à la mine Mbola. Objectif de l’expédition, selon Muyambo, inciter les creuseurs à la haine tribale avant de les entraîner à piller de fonds en comble les lieux investis : minerais et importantes sommes d’argent s’envolent ainsi. Mais pas pour tout le monde. Katumbi chargera un de ses lieutenants nommé Kamwanya de la récupération à crédit des minerais pillés et de leur acheminement à un four qu’il venait d’acquérir de la Gécamines.
Certes, Clément Kabasele n’a pas subi l’extorsion sans réagir. Jean-Claude Muyambo rapporte que l’inventeur avait dûment porté plainte au Parquet de Grande Instance de Kipushi, sans succès. On n’affronte pas impunément le TP président du TP Mazembe, hier comme aujourd’hui, sans doute. Léonard She Okitungu, directeur de cabinet du Président de la République, s’est ému de l’affaire et a adressé une correspondance sur le sujet aux autorités provinciales, sans succès. Tout comme le ministre de l’intérieur de la même époque, le Pr Théophile Mbemba Fundu, qui avait donné des injonctions non exécutées sur la sécurisation d’une propriété minière privée. « Finalement, suite à ces pillages, destructions et vols de ses biens, Monsieur Kabasele va piquer une crise et va rendre l’âme », écrit Jean-Claude Muyambo.
Moïse Katumbi Chapwe, c’est le plus que probable candidat à la prochaine présidentielle du G7, le groupe de frondeurs qui ont récemment claqué la porte de la majorité présidentielle en RD Congo. Quelle pièce de rechange !
J.N.
in, Le Maximum n° 309 du 9 octobre 2015