Des géants miniers opérant en RD Congo ont décidé de se liguer pour contrer la réforme du code minier et par ricochet l’Etat rd congolais. Ils ne lésineront pas sur les moyens pour défendre leurs investissements, font-ils comprendre. La menace est réelle.
«Oses, tu verras », voilà comment se résumerait la lettre verte, véhémente, qu’un groupe d’opérateurs miniers en tête desquels Mark Bristow, DG de Randgold (Kibali goldmines), ont adressé au Chef de l’Etat le 8 février dernier. China Molybdenum, Ivanhoe mines ltd, MMG ltd, Zijin Mining Group Co, Anglogold Ashanti …Glencore Plc et Rangold Ressources ont demandé une réunion « pour mettre de nouveau en avant nos positions » sur les modifications du code minier approuvées par les législateurs le 27 janvier, rapporte Bloomberg.
Même si le ministre des Mines, Martin Kabuelulu, dit ne pas au courant de la fameuse lettre des miniers au Chef de l’Etat, l’on sait qu’un certain lobbying international se fait jour autour du cobalt rd congolais indispensable au fonctionnement des voitures électriques…mais pas seulement.
Joseph Kabila n’a pas encore promulgué le Code minier révisé. Mais les propos de Mark Bristow, dont l’entreprise exploite l’or dans la province du Haut-Uélé voisine de la fragile province de l’Ituri, sont davantage prémonitoires et valent plus qu’un avertissement. «Regarder les gens se tirer une balle dans la tête, même dans le pied est frustrant pour moi », a déclaré, selon bloomberg, le DG de Randgold, lors d’une interview le 5 février dernier au Cap, en Afrique du Sud, en marge d’Indaba…une sorte d’OPEP d’opérateurs miniers. “L’environnement minier en RDC doit être amélioré, mais amélioré en consultation avec les principaux investisseurs, qui sont China Molybdenum, Glencore et nous-mêmes », intime Bristow sur un ton pour le moins comminatoire. Les minings ont décidé de formaliser leur « relation en créant une association de grandes sociétés minières en RDC » et déclaré vouloir défendre leurs investissements par tous les moyens nationaux et internationaux. Voilà qui rappelle les menaces proférées en 1997 par Banro et les autres majors contre Laurent-Désiré Kabila. Ou encore en 1960, par les responsables belges de l’Union Minière du Haut Katanga, la future Gécamines. L’on sait ce qui arriva dans l’un et l’autre cas: guerres civiles, rébellions,etc. L’on ne serait pas forcément catégorisé parmi les prophètes des malheurs en affirmant que dans l’Est et dans le Katanga, ça n’est pas de la main-d’œuvre criminelle qui ferait défaut pour monter des mouvements subversifs contre l’Etat. D’ores et déjà, le cartel des minings emmenés par Mark Bristow ne veulent plus d’Albert Yuma. Président de la FEC, Fédération des entreprises du Congo, et PCA de la Gécamines, Yuma est accusé d’avoir sacrifié les investissements des opérateurs privés sur l’autel des intérêts de l’Etat. Désormais, le cartel des minings opposés à la révision du Code minier tient à ce que leur organisation nouvellement créée remplace la Chambre des mines/FEC pour « avoir été incapable de consolider et communiquer de manière satisfaisante nos souhaits lors de la nouvelle révision du Code minier». Un autre bras de fer, intra-FEC celui-là, en perspective. Interrogé, Albert Yuma, le patron des patrons d’entreprises en RD Congo soutient qu’”Il existe des procédures pour se retirer de la FEC, donc ils (les miniers, ndlr) doivent respecter les procédures“. Et refuse de commenter les critiques selon lesquelles il aurait travaillé contre les intérêts des membres de la FEC lors de la révision du code, affirmant qu’il n’était “ni un parlementaire ni un membre du gouvernement”.
ABIJA BENAJA